Autonomies animales, sous-titré Ouvrir des fronts de luttes interespèces est un livre écrit par Vipulan Puvaneswaran, Shams Bougafer et Clara Damiron. Un peu plus de 200 pages rédigées par ces trois jeunes gens pour nous enjoindre à la réflexion !
Les humains que nous sommes ont colonisé la planète à la seule fin de se satisfaire et trop souvent au détriment de toutes les autres espèces vivantes. L’effondrement de la biodiversité et le dérèglement climatique nous contraignent à rebattre les cartes. Nous ne sommes pas les maîtres du monde, et si nous l’avons été, le résultat n’est pas très brillant aujourd’hui. Voilà un essai qui se lit sans difficulté et qui, pour peu qu’on renonce à certains préjugés, vient nous chercher dans nos meilleurs retranchements.
Les auteur.es ne nous contraignent nullement à adopter leur point de vue sur tout. La question animale peut ainsi en rejoindre d’autres qui n’étaient pas évidentes au premier regard. La revendication en est intellectuellement radicale, mais les solutions proposées ne sont ni brutales ni absurdes. Peut-être est-ce la maturité de l’approche qui m’a séduite ?
Je vous l’accorde, énoncé comme ça, le concept d’autonomies animales, n’est pas immédiatement parlant. Mais laissez-vous interpeler, laissez-vous un peu déranger !
Les animaux
Les animaux sont présents sur la planète à nos côtés, parfois dans nos demeures, parfois exploités, parfois simplement sur un territoire que nous pensons avoir la bonté de leur allouer.
Actuellement, nous avons tant abimé notre planète que ces habitants, aussi légitimes que nous à exister, disparaissent en nombre et en diversité. Par ailleurs, nous ne cessons nos incursions dans le peu d’espace que nous leur concédons encore, réveillant ainsi des bestioles susceptibles de générer des épidémies rapides comme le Covid-19 ou plus lentes, plus insidieuses comme la maladie de Lyme.
Le nombre des insectes s’effondre
C’est écrit partout, ça fait moins vibrer les foules que les petits chats ou les baleines, mais c’est sans doute encore plus grave. Plus d’insectes, plus d’oiseaux. Plus de pollinisateurs, plus de plantes, de fruits, de légumes. Les disettes nous pendent au nez. On nous a vendu une agriculture reposant sur la chimie qui n’a jamais su nourrir le monde proprement, mais a détruit les milieux et les sols. On a fabriqué des agriculteurs dépendants de l’industrie chimique qui, outre le fait qu’ils sont les premières victimes, souffrent d’être souvent détestés et pas aidés lorsqu’ils sont prêts à opter pour de l’agroécologie.
L’élevage comme rapport à l’animal
Certes, il y a élevage et élevage ! Il y a la ferme familiale ou collective d’ailleurs, qui élève des animaux dans les champs et ne demande pas à ses vaches de surproduire du lait. Et il y a l’élevage industriel, qui modifie génétiquement ses cochons pour qu’ils fassent plus de viande. Cet élevage ne fonctionne qu’aux antibiotiques (qui ne devraient pas être automatiques !) parce que les mamelles hypertrophiées des vaches ont des infections à répétition. Une industrie qui comme le reste de l’agro-industrie est biberonnée aux produits des laboratoires pharmaceutiques.
Il n’est alors aucunement question de respect de la vie ; seulement de l’organisation de la mort sans vie préalable. Point n’est utile dès lors de parler de relation avec les autres vivants qui ne sont que ressources/nuisibles/bénéfices/coûts.
Autonomies animales
Ouvrir des fronts de luttes interespèces
Michel Lafon éditions
Ne nous trompons pas d’ennemi !
Pour Vipulan, pas d’ennemis chez les paysans, les éleveurs !
Pas d’ennemis non plus dans les abattoirs ! Et chez les animaux, non plus !
Ce que proposent les auteur.es, c’est de se pencher sérieusement sur ceux à qui profitent les écocides et de réfléchir à la condition de tous les vivants, ensemble.
Qu’est-ce qu’un animal ?
Parce que l’animalité ne se définit pas seulement par une absence d’humanité, Vipulan et ses deux comparses se sont interrogé.es sur ce qui relie la question animale aux autres luttes pour l’émancipation. La domination est un mode de fonctionnement qui a un vaste champ d’application !
Pourquoi partager ?
Parce que la planète est notre unique espace de vie et que nous dépendons tous les uns des autres, les auteur.es nous proposent de partager. Ils nous enjoignent de réfléchir à d’autres relations avec les vivants et avec le non-vivant.
Autonomies animales ?
Et comme l’exploitation des vivants – humains compris – du Vivant et du non-vivant présente un grand nombre de points identiques, le concept d’autonomies animales est né.
“Ici, nous pensons que nos pratiques doivent être guidées par l’idée de liberté, qui doit être ajustée en fonction de l’être et de l’espèce considérée : nous savons pertinemment qu’il est complètement absurde de revendiquer un droit de vote pour les chèvres…”
p.76
La maladie de Lyme, une zoonose
Cette dernière est de plus en plus présente en Europe, via l’espèce vectrice – Ixodes ricinus – qui y est largement répandue en dehors du pourtour méditerranéen et des régions en altitude. C’est une tique dure exophile qui se rencontre dans différents types de milieux (forêt, pâtures boisées, jardin).
Des animaux qui font du dégât !
Une récente revue de la littérature a estimé une incidence moyenne annuelle de 85 000 cas par an. En France, le taux d’incidence annuel était de 53/100 000 entre 2009 et 2017 selon les données du Réseau Sentinelles. Le taux d’incidence annuel des cas vus en consultation de médecine générale en 2019 était de 76 cas / 100 000 habitants. On commence à envisager sérieusement que les tiques n’en soient plus le seul vecteur, et que les moustiques ou araignées puissent ainsi la répandre. L’inquiétude est suffisante pour que le Sénat s’en soit emparé.