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René, le dernier des maraîchers de Saint-Denis ?

Chez les Kersanté, la culture maraîchère est une affaire de famille. Installée à deux pas de la station de métro “Saint-Denis-Université”, en face (ironie du sort) d’un fast food, cette famille assume depuis les années 1920 son rôle de maraîcher : nourrir la cité. Mais pour René sonne l’heure de la retraite. 

 

Se rendre sur cette exploitation de 3 hectares en plein Saint-Denis, c’est un peu comme faire un voyage dans le temps. La petite maison à laquelle Marie Pellan, la grand-mère de René avait fait ajouter un étage n’a pas bougé.

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Archives familiales Kersanté
Archives familiales Kersanté

Sur le toit, deux grosses citernes noires caractéristiques des exploitations maraîchères du début du XXème siècle sont toujours là, et en activité. Le champ de salades ferait presque oublier la ville alentour ; seul l’horizon des barres HLM rappelle que nous sommes en banlieue parisienne. 

C’est René Kersanté qui veille au grain et dirige l’exploitation, mais sa retraite est imminente. Les repreneurs potentiels ont jusqu’au 15 juin, date limite de dépôt des dossiers, pour se manifester auprès de la municipalité… La ville de Saint-Denis, propriétaire des terres exploitées, souhaite qu’elles restent dédiées à l’agriculture, très probablement au travers d’un projet de réinsertion. Mais si personne ne souhaite prendre la relève, c’est tout un pan de l’histoire agricole de la région parisienne qui s’éteindra.

Né en 1941 dans la maison familiale, René à tout connu : la grande époque des familles de maraîchers (près de 200 réparties sur les communes de Saint-Denis, Stains, Pierrefitte et Bobigny), les techniques maraîchères héritées du XIXème siècle (cloches, châssis, couche chaude …), puis, à partir de 1956, le déclin programmé, les exploitations disparaissant les unes après les autres sous la pression de l’urbanisme galopant.

La résistance

Les Kersanté, eux, ont résisté à l’expansion urbaine. À coup de ténacité et portés par une sacrée bonne étoile. Promise à l’expropriation depuis 1956, l’entreprise familiale a changé de statut et endossé celui de patrimoine vivant.

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René qui aime à dire qu’il est « le dernier maraîcher chez qui on peut se rendre en métro » a décidé de prendre… à 75 ans, une retraite bien méritée. Il va se retirer sur ses terres de l’Oise, acquises à l’époque ou l’expropriation menaçait et où perdure le savoir-faire Kersanté. La fille et le gendre de René y ont une exploitation maraîchère, et c’est là-bas désormais qu’il arpentera les champs, en maraîcher heureux, son éternel chapeau en cuir vissé sur la tête.

Fabrice Chollet

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