Je la contemplais sur les coteaux du bois, offrant ses fleurs couleur chartreuse à l’hiver déclinant. Elle me réjouissait, signant le retour d’un printemps tant attendu. J’ignorais tout d’elle mais je l’aimais déjà.
Un jour d’audace, l’ignorante jardinière que j’étais s’est risquée, petite pelle en main, à arracher la belle à sa terre d’élection. J’en ai ramené un plant dans mon jardin que j’ai délicatement disposé avec amour. Las. La belle n’a pas daigné survivre et c’est avec tristesse que je l’ai vu dépérir.
Et puis, les années passant et tant d’autres choses à faire dans mon jardin, je me suis contentée de la regarder lors de mes ballades, presque inaccessible sur la pente du sous-bois.
JE SUIS VENUE TE DIRE QUE TOUT VA BIEN…
Et voilà que presque trente ans plus tard, alors que je désherbais rageusement entre les invasives pousses de cornouillers, que vois-je ? Un bouquet de feuilles vert foncé qui semblait vouloir s’étendre rageusement entre les fines branches orange. Elle était là, la précieuse. Quelle magie l’avait introduite dans mon jardin ? Le vent, un oiseau ? Les jardiniers le savent, nous bénéficions de multiples baguettes magiques dans l’exercice de notre art…
Mais peu importe laquelle avait agi, je regardais mon Helleborus foetidus avec le même éclat dans les yeux que certaines devant la devanture d’un grand joaillier. Je lui ai fait de la place, lui ai souhaité la bienvenue dans mon jardin, lui ai fait des révérences. Vous pensez bien, un tel honneur se devait d’être dignement fêté !
Depuis, elle se ressème où bon lui semble et je l’aime toujours autant. De part et d’autre de la petite barrière, contre le talus de la route, elle offre aux passants sa floraison généreuse quand la nature dort encore. Elle est porteuse d’un message subtil: “Je suis venue te dire que tout va bien, sous la terre dort la promesse du renouveau. Patiente encore quelques semaines. En attendant, je veille et t’émerveille.”

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