Chère Isabelle, je rentre de Bourgogne et d’une visite formidable au Flérial, qui bénéficie d’un climat particulièrement clément. Nous y avons vu mille merveilles, le tout étant présenté avec goût, soin, et présentant l’épanouissement le plus remarquable de végétation qu’il m’ait été donné de voir depuis le début de l’hiver.
Nous avons traîné longuement auprès des bassins, à admirer les Iris du Japon dont tu nous avais tant parlé, leur floraison est exceptionnelle ! J’adore leurs nuances subtiles de violet et le cœur jaunâtre de leur gorge à peine perceptible tant les bourdons n’arrêtent pas d’y affluer. Nous nous sommes installés dans l’herbe grasse un long moment pour goûter à la douceur du climat bourguignon, profitant ainsi de la floraison des nombreux nymphéas et des joncs fleuris, que notre guide n’a pas manqué d’aller nous quérir dans l’onde claire où s’ébattaient en un chatoiement de couleurs délicieuses les poissons étincelants, les grenouilles alertes et les libellules virevoltantes.
Nymphéa et herbe fraîchement coupée…
Nous avons pu admirer les berges soignées, le choix magistral de l’assortiment variétal et, surtout, le paysage lointain donnant sur les collines ensoleillées où nous tentions de deviner les vignes et les noyers entre les vols de tourterelles. Ah ! Si tu avais vu ce fabuleux nymphéa ‘Peach Sunrise’ éclatant de beauté, sa fleur extravagante s’élevant légèrement au-dessus de l’eau avec pour fond de décor les pontédéries azurées, tu aurais été aussi enchantée que nous, j’en suis sûr. Après avoir parcouru quelques allées tondues où paraissaient déjà les premières fleurs de carotte sauvage, dans une odeur d’herbe fraîchement coupée se mêlant à celle des dernières fleurs de cerisiers, nous sommes ensuite allés nous reposer sur la terrasse du joli abri – entourés de rosiers en pleine éclosion nous baignant dans des effluves bienfaisants où bourdonnaient les abeilles – pour nous y languir un peu en attendant que le soleil frappe moins fort.
Cocon et papillons !
Quel dommage que tu ne connaisses pas cet endroit, et que mon téléphone soit tombé en panne juste au moment où je commençais à t’envoyer des photos! Et cette pépinière ! Si tu avais vu cette pépinière ! Je n’aurais jamais cru que l’on puisse avoir un tel choix si tôt dans la saison, on ne savait même plus où donner de la tête ! Je me suis cependant un peu retenu, de peur que les plantes ne supportent pas le choc thermique à mon retour. Nous allons rester un peu, pour nous remplir un peu encore de l’infinie quiétude lumineuse de ce cocon de tiédeur, cernés par les fleurs, les papillons et les passereaux joyeux.
Je sais que vous n’avez vraiment pas très beau temps à Paris, et j’ai longtemps hésité à te faire part du bonheur que l’on éprouve dans l’exquise douceur exceptionnelle que l’on trouve dans le microclimat local. Mais j’ai repensé à tes dernières vacances sur les chaudes rives de la Méditerranée lointaine l’an passé, quand ici il pleuvait ou neigeait à pierre fendre et que mes doigts engourdis par le froid intense peinaient à tenir ta carte postale idyllique sous un vent du Nord à décorner les chefs de gare. Je me souviens combien ta missive m’avait fait du bien et voulais que tu éprouves un plaisir comparable.
Je t’embrasse. J’espère que le verglas a cessé chez vous, et que la pluie n’est pas trop pénétrante. Bon courage, bise !
E.Lenoir (Le Flérial, Volgré, 28 février 2018), auteur, créateur du jardin punk, utilisateur de pots 100% écolo en Bourgogne