” La biodiversité est l’un des déterminants majeurs et une des clefs pour obtenir un meilleur niveau de santé ” selon la Dr Maria Neira [OMS Organisation Mondiale de la Santé].
Et la santé humaine est le résultat d’un ensemble de facteurs environnementaux, sociaux, économiques et génétiques. Un colloque organisé par CDC Biodiversité récent s’est penché sur ce sujet.
Comme le constate François Couplan, ethnobotaniste, dans son dernier livre2, ” à l’exception du sel, de l’eau et de l’oxygène, tous les produits que nous absorbons proviennent, sous une forme ou une autre, des végétaux.” Même la viande n’est jamais que du végétal transformé ! Nos médicaments sont, pour un grand nombre, issus des plantes. Or, presque 90 % de la production agricole mondiale ne repose que sur une vingtaine de plantes différentes seulement. Lorsque l’on sait que 1600 espèces végétales sont possibles à cultiver en Europe, cela semble assez absurde. L’urbanisation, l’utilisation d’intrants agricoles, la culture intensive et la méconnaissance de la nature induite par la vie en ville sont autant de raisons qui s’entrecroisent.
Urbanisation galopante
Alors que l’artificialisation des sols et l’urbanisation de nos vies sont galopantes, la question de la biodiversité se pose de façon vitale. En France hexagonale, plus de 80% de la population vit en zones urbaines et 38% dans des zones très denses [INSEE]. À croissance économique égale, notre pays urbanise deux fois plus de terres que notre voisin l’Allemagne. Or, les sols remplissent des fonctions essentielles pour le bon développement des sociétés [Unicaen-HAL].
Le sol est à la fois support de vie, mais aussi filtre pour les eaux ou encore siège de la microfaune et de la flore. Dans le cas des sols urbains, les échanges avec le milieu, les transferts (eau, énergie, chaleur, pression) sont modifiés au détriment de la faune et de la flore. La disparition alarmante des oiseaux et des insectes en atteste en ville, mais hélas aussi en zones agricoles.
Par ailleurs, les urbains, déconnectés d’un rapport quotidien à la nature et à ses cycles naturels, perdent la conscience de la saisonnalité tant dans leur alimentation que dans leurs choix de loisirs.
Une agriculture productiviste
Le modèle productiviste est le résultat d’une histoire de la croyance dans le progrès et la chimie, de la volonté économique et du développement commercial de l’après-guerre. L’objectif étant de produire beaucoup avec une main d’œuvre réduite pour nourrir une population en forte croissance.
Aujourd’hui, il est de plus en plus remis en cause en raison des dégâts produits sur la biodiversité. La disparition des haies et des bocages, la réduction des espèces cultivées, l’irrigation intensive, l’appauvrissement des sols, tout justifie un changement d’organisation. À ceci s’ajoutent les problèmes de santé des agriculteurs eux-mêmes et des maladies apparues dans les populations.
La nature nous offre la santé
Sur le plan de la santé physique comme psychique, la présence de la nature dans nos vies s’avère fondamentale. Et, lorsqu’on parle de nature, on parle de biodiversité. La propagation de maladies par l’introduction ou la réduction d’espèces, la déforestation… La dynamique d’effondrement de la biodiversité joue un rôle prépondérant dans l’augmentation des risques liés à la santé humaine, selon l’OMS.
Les maladies chroniques prédominent dans les pays du Nord jusqu’à 88 % de la mortalité totale. L’âge, le sexe, la génétique et les facteurs comportementaux (tabagisme, alcool, malnutrition, surpoids et sédentarité) sont majeurs. Le rôle de la nature et de la biodiversité est capital pour le microbiote, le système immunitaire et pour la variété alimentaire.
Les allergies en hausse
Ainsi, des recherches montrent que la diminution de la biodiversité, et des contacts entre les individus et la nature appauvrissent le système immunitaire et favorisent le développement de maladies inflammatoires parmi lesquelles les allergies.
Isabella Annesi-Maesano, Directeur de Recherche à l’INSERM, écrit : ” Les êtres humains sont protégés par deux couches imbriquées de biodiversité : celle de la couche externe (sol, eaux naturelles, plantes, animaux, etc.) et celle de la couche interne (au sein des organes). Ce sont les variations entre ces deux couches et notamment dans leurs microbiotes qui sont à l’origine des problèmes de santé, par le biais de modifications de la réponse immunitaire. “
(Science Publique – France Culture)
Le microbiote
Le microbiote humain est constitué de l’ensemble des micro-organismes (virus, bactéries et champignons non pathogènes) vivant dans le corps humain. Le microbiote intestinal, notre deuxième cerveau, est le plus important et a un rôle prépondérant dans les fonctions digestive, métabolique, immunitaire et neurologique. Ça fait beaucoup ! Une dysbiose ou altération de la flore intestinale a des conséquences sur toutes ces fonctions, y compris sur notre état psychique.
(Lire Giulia Enders, gastroentérologue : Le charme discret de l’intestin – Science Publique – France Culture)
Fréquentez la nature !
Augmenter la fréquence des contacts avec la nature permet de pallier les manques liés au mode de vie urbain :
Ainsi, la marche , le jardinage ou le cyclisme en pleine nature réduisent le risque d’hypertension artérielle, d’obésité, d’ostéoporose, de cancers, mais aussi les troubles anxieux et la dépression.
La nature et la biodiversité soignent
Les plus grandes avancées de la médecine contemporaine ont été faites grâce à des substances actives naturelles. Par ailleurs, la médecine moderne repose sur le socle de la médecine traditionnelle, la connaissance des principes actifs issus de la biodiversité et les savoirs ancestraux.
L’attention
Des études nombreuses montrent que notre attention, sans cesse sollicitée dans le cadre professionnel comme personnel, se régénère et se répare après une promenade dans un jardin ou une forêt. Ainsi, les étudiants et les écoliers gagneraient à passer leurs examens après une belle balade !
La bonne forme physique
Par ailleurs, le jardinage comme la marche entretiennent la forme physique et constituent un bon moyen de lutte contre le surpoids et l’obésité. Le mouvement, plus ou moins soutenu, est une nécessité, mais tend à se faire rare dans les vies sédentaires. Nos muscles comme nos articulations en ont un besoin vital, mais aussi nos os et tout le système respiratoire.
” Nous sommes ce que nous mangeons ” (Feuerbach). La variété des saveurs, des textures, mais aussi l’exceptionnelle qualité nutritive de nombre de plantes justifient pleinement de travailler un potager et un jardin riche en espèces. Notre énergie et notre résistance en dépendent !
Enfin, jardiner nourrit une bonne estime de soi, nécessaire à une belle vie !
À voir
Dans son film Natura, Pascale D’Erm sillonne le monde à la recherche des scientifiques capables de démontrer ces bienfaits. Du Japon aux États-Unis, en passant par la Suède, l’Allemagne ou le Canada, Natura part à la rencontre de chercheurs pionniers – biologistes, neuroscientifiques, médecins, experts en psychologie environnementale – qui démontrent que “l’expérience de nature” stimule des ressources biologiques et psychiques insoupçonnées et représente une source inépuisable de bien-être physique et mental.
Retrouvez les projections sur la page Facebook de Natura et son livre Natura aux éditions des liens qui libèrent
1 – La notion même de biodiversité comprend trois niveaux interdépendants.
- La diversité des milieux de vie à toutes les échelles (les écosystèmes) : océans, prairies, forêts… au contenu des cellules (pensons aux parasites qui peuvent y vivre) en passant par la mare au fond de son jardin ou les espaces végétalisés en ville.
- Celle des espèces qui vivent dans ces milieux, qui sont en relation les unes avec les autres (prédation, coopération…) et avec leurs milieux de vie.
- La diversité des individus au sein de chaque espèce : autrement dit, nous sommes tous différents ! Les scientifiques parlent de diversité génétique pour ce troisième niveau. (Ref)