L’araucaria fascine à raison. Silhouette originale, gros fruits insolites en cônes, arbre impossible à escalader d’où son surnom de désespoir du singe. Quelles sont les exigences de cet arbre ? Où le planter ? Comment bien vous occuper de lui ? Les conseils du pépiniériste Julien Raehm (Atypique Flore).
Hortus Focus : Quel est l’araucaria le plus planté chez nous ?
Julien Raehm : C’est Araucaria araucana, celui que l’on appelle effectivement le désespoir du singe, car son feuillage est bien piquant et il ne s’y risque pas. Il est originaire du Chili, de régions au climat assez froid et au sol rocailleux. Il a donc besoin d’un sol drainant, mais d’une humidité ambiante importante. Le Sud-ouest, la Bretagne, la Bourgogne lui vont bien, le sud de la France, la vallée du Rhône beaucoup moins. Beaucoup d’araucarias dépérissent assez vite dans ces régions. Il est souvent planté dans des massifs très ensoleillés, très secs, où son air de cactus géant fait de l’effet, mais ce n’est pas son biotope…
Mais on n’a pas forcément l’image d’un Chili froid et humide ?
L’araucaria pousse dans la partie chilienne de la cordillère des Andes. Rien à voir avec le Chili désertique que l’on connaît mieux ! Dans son milieu naturel, il pleut beaucoup, mais le sol est très drainant. Il ne faut donc pas le planter chez nous dans un sol qui en hiver, garde l’eau, et reste donc humide en permanence. C’est l’échec assuré. L’araucaria périra, car ses racines vont pourrir.
Quelles sont donc les précautions à prendre au moment de la plantation ?
Il faut lui ménager un grand trou de plantation, pour permettre aux racines de bien s’installer. Mélangez la terre retirée avec des copeaux de bois, de l’écorce de pin ou du gros gravier pour permettre un meilleur drainage. En deux ou trois ans, l’araucaria aura fait ses racines dans cette terre plus meuble. Il faut aussi bien réfléchir à son emplacement. C’est un arbre à croissance lente, mais qui va finir par devenir très grand et occuper une largeur de 5 à 6 mètres. Il doit donc être planté à un endroit où, à terme, il ne gênera rien ni personne. Tailler des branches devenues gênantes enlaidira sa silhouette naturellement belle.
Autre particularité de l’araucaria : ses fruits. Tu peux nous en dire plus ?
On parle de cônes, mais seul le temps permet de dire si l’arbre est mâle ou femelle. Il faut attendre, comme pour le Ginkgo biloba, environ une vingtaine d’années pour le savoir quand les plants sont issus de semis. Ils ont en commun leur comestibilité ! On l’ignore très souvent. C’est comme ceux du Ginkgo, on ignore qu’ils sont comestibles, mais eux puent tellement qu’on n’a vraiment pas envie de les manger ! C’est pour cette raison que l’on greffe les ginkgos pour avoir des mâles et pas de fruits puants.
Sèmes-tu tes araucarias ?
Oui, ceux que je produis naissent de semis. Donc, je ne peux pas dire s’ils sont mâles ou femelles. Il faut attendre que l’arbre soit mature pour le savoir.
La rusticité de l’araucaria est-elle bonne ?
Araucaria araucana tient -15°C degrés en sol drainé, on peut donc le planter dans de très nombreuses régions. Il a un cousin, Araucaria angustifolia, le pin du Parana, qui lui est endémique du Brésil et vit dans un climat plus tropical, plus chaud, et qui résiste un tout petit peu moins bien, mais tout de même au moins -12°C. Il existe d’autres espèces d’araucarias tropicaux qui vivent en Nouvelle-Calédonie, en Australie.
Qu’est-ce qui te paraît également intéressant chez le désespoir du singe ?
Comme chez de nombreux conifères, la jeune pousse est toujours plus claire. Chez l’araucaria, on a vraiment une très belle différence pendant environ 3 semaines quand la plante commence à pousser.
La culture de l’araucaria est-elle possible en pot ?
Oui, mais elle ne peut pas excéder quelques années. Tout dépend de la taille à l’achat. Si votre araucaria, quand vous l’achetez, mesure 1 m à 1,5 m de haut, vous pourrez le garder deux à trois ans dans un gros pot. Mais n’oubliez pas que c’est un arbre et qu’il doit rejoindre la pleine terre rapidement pour bien se développer. Sa place, c’est dans un jardin.
Faut-il craindre des maladies ?
Comme beaucoup de conifères, il peut être atteint par une espèce de Phytophtora, suite à un gros coup de chaud suivi de pas mal de pluie. Ce champignon provoque un dessèchement interne du tronc et se poursuit sur les branches. L’arbre ne s’en remet généralement pas. C’est pourquoi il est important de le planter dans un sol très drainant.