Marina Cordes habite dans un quartier résidentiel de Muret, dans la Haute-Garonne. Paysagiste, elle met ses connaissances en application chez elle. Comment protéger son intimité sans s’enfermer ? Quels arbres ou arbustes planter en respectant son voisinage ? Quels aménagements privilégiés ou éviter ? Ses conseils dans notre vidéo.
Hortus Focus : quand on emménage quelque part, le premier réflexe est souvent de planter une haie pour ne pas vivre au regard de tous. Quelle est l’erreur à ne pas commettre ?
Marina Cordes : celle que j’ai commise ! À l’époque de la construction de la maison, je n’étais pas encore paysagiste et j’ai fait l’erreur de planter, comme bon nombre, une haie monospécifique. C’est pratique, ça pousse vite. En deux ans, elle peut déjà servir d’écran protecteur. Mais quelle erreur écologique ! Et esthétique aussi. Une haie monospécifique ne peut entretenir la biodiversité. Il faut planter des arbustes divers, persistants ou caducs. Le décor va donc changer au fil des saisons. Et la diversité va permettre à des pollinisateurs, des insectes, des oiseaux de toutes sortes de fréquenter le jardin, voire de s’y installer. Petit à petit, je corrige donc cette erreur de débutante.
Doit-on respecter des distances de plantation ?
Oui, le code de l’urbanisme est très clair là-dessus. L’article 671 du Code civil fixe les distances de plantation dans le cadre de la mitoyenneté. Arbres et arbustes doivent être plantés à 2 mètres de la ligne séparation entre deux terrains s’ils dépassent 2 m à l’âge adulte ou à 50 cm pour les plantations dont la hauteur est inférieure à 2 m (NDLR : plus de précisions, croquis à l’appui, sur cet article 671 ICI). Bien sûr, on peut planter ce qu’on veut… Mais un marronnier, un noyer ou tout autre arbre imposant peuvent devenir un gros souci des années plus tard. Frottement contre les façades, chute de branches, trop d’ombre sur la maison voisine… tout ceci peut mettre en péril de bonnes relations de voisinage.
Comment préserver son intimité sans s’enfermer complètement ?
Il faut jouer sur les perspectives, planter des haies variées, choisir avec soin ces arbres et arbustes qui vont laisser passer la lumière, mais en protégeant des regards de la rue… On peut aussi avoir, comme ici, un muret en bord de terrain, mais ne pas ajouter de claustras, de balustres, de panneaux pleins. Je me suis contenté d’un muret de 0,80 m et j’ai planté devant. Cela nous protège des regards, mais permet également aux passants de profiter du spectacle du jardin en toute saison. Notre zone complètement privative est située à l’arrière de la maison.
Que peut-on faire contre le bruit ?
En ville ou en lotissement, la contrainte sonore est inéluctable ! Et les bruits de la vie courante peuvent rapidement devenir envahissants… Il faut veiller à respecter les règles mises en place dans votre commune (pas de tondeuse le dimanche, par exemple), mais on peut également jouer avec le végétal pour “casser” le bruit : les grosses feuilles, les feuilles d’eucalyptus et celles des bambous, par exemple, jouent les filtres sonores ; une haie va estomper un peu les sons. Dans mon jardin, j’ai installé des mobiles aux sonorités toutes douces pour créer des bruits agréables sans pour autant gêner les voisins…
Que te reste-t-il à faire dans l’aménagement de ton jardin ?
Oh la la, tellement de choses ! Je continue à planter des arbres et plus seulement des érables comme je l’ai fait au tout début. Je suis ravie d’avoir planté des eucalyptus, des viornes et puis ce plaqueminier qui peut être taillé pour une mise à fruits optimale et nous enchante côté terrasse. Comme je ne dispose pas de grandes diagonales, je travaille beaucoup sur les cheminements qui réservent des surprises quand on se promène dans le jardin et je vais en mettre de nouveaux en place. Une façon d’inciter le visiteur à aller découvrir une plante qu’il ne voyait pas au départ, mais cela peut l’obliger aussi à bifurquer ou à faire demi-tour pour aller voir ce végétal qui l’avait attiré. Sur un petit terrain, il ne faut pas hésiter à tricher”…
Je sais que mon jardin commence à être mature. C’est comme un enfant. Il est né, il a grandi, il a évolué. J’aimerais maintenant intégrer des végétaux plus surprenants ou plus difficiles à acclimater. Quand j’ai commencé, j’ai opté pour des végétaux compliqués tout en ne possédant pas la maîtrise de mon sol. Autre erreur de jeunesse… j’étais trop pressée d’avoir un jardin. Maintenant, je me plante moins souvent…