Jardins de la pensée, c’est le thème de la 27e édition du Festival international des jardins au Domaine de Chaumont-sur-Loire. Il a inspiré des architectes, paysagistes, pépiniéristes français, russes, italiens, japonais, canadiens… Palmarès du jury en fin d’article. Mes préférences ci-dessous…
Libres
Pour la deuxième année, le collectif de pépiniéristes Plantes et Cultures s’est vu confier l’une des “cartes vertes” du Festival des jardins. On entre dans ce jardin par un court tunnel, on “bute” sur une barrière de bois où s’ouvrent des ipomées bleues. Faut-il prendre à droite ? À gauche ? À vous de choisir… Vous êtes libres. Libres de faire le tour dans ce jardin. Libres d’emprunter les étroits passages en planches qui séparent les plantations. Observateur ou acteur ? Contemplatif ou curieux ? À vous de choisir de profiter – ou non – des opportunités offertes, de parcourir – ou non – les rayons de cette bibliothèque végétale, de vous installer – ou non – sur les deux sièges en mosaïque pour profiter des senteurs et des couleurs travaillées de la plus chaude (jaune) à la plus froide (bleu). La liberté de la pensée se nourrit des savoirs, de tous les savoirs. Piochez ici des idées pour nourrir votre jardin au propre et au figuré.
La French Fine Fleur : Arom’Antique, Atelier du végétal, Créa’Paysage, Ets Horticoles du Cannebeth, Ets Pierre Turc – Turcieflor, Flos Sabaudiae, Jardin d’Adoué, La Canopée, Le jardin d’eau, Lepage Bord de mer, les Murets du Causse, les Senteurs du Quercy, Pépinières des Laurains, Pépinière Travers, Sempervivum et Cie.
Le jardin des voyelles
Une autre carte verte a été donnée cette année à l’Oulipo (Ouvroir de Littérature Potentielle), groupe créé en 1960 par Raymond Queneau et François Le Lionnais. Coup de cœur total pour ce jardin où toutes les voyelles ont été remplacées par des fleurs. À chaque voyelle correspond une plante. À vous d’emprunter le cheminement de bois et de “déchiffrer” le poème.
Entrez dans la pensine
Allez, je peux le dire, je m’attendais après avoir lu, à l’entrée du jardin, les mots du professeur Dumbledore à pénétrer dans un univers à la Poudlard, plein de chaudrons, de balais de quidditch, de choipeaux, de tableaux animés et de plantes magiques… Que nenni ! Mais au bout du chemin sinueux bordé de vivaces (et notamment en juillet d’une superbe achillée rose pétard), arrive la pensine, un lieu où l’on aime s’asseoir, faire une simple pause en regardant la mini fontaine. La pensine, elle, est directement inspirée du livre de JK Rawlings. La pensine, c’est le réceptacle magique rempli des pensées et des souvenirs de son utilisateur. Confiez les vôtres à ce jardin éphémère…
Paysagistes concepteurs : Bérengère Lecat et Stéphane Larcin. Prix de la palette et de l’harmonie végétale.
La possibilité d’une île
Asseyez-vous sur le banc, regardez et surtout, fermez les yeux et écoutez… Écoutez le coassement des grenouilles, le léger bruit du vent dans la charmille… et les commentaires des visiteurs. Ça va de “Quel foutage de gueule, c’est pas un jardin ça”… au silence admiratif. Un érable pourpre trône solitaire dans un coin supérieur du bassin. Son feuillage se reflète dans le miroir d’eau. La caméra est restée sur le paillis d’ardoise à fleur d’eau, mon regard a plongé vers le miroir tout juste ému par la brasse des grenouilles. Je suis restée là, un peu hypnotisée. Plus rien ni personne n’avait d’importance. La magie d’un jardin qui n’est pas vraiment un jardin.
Architecte : Ulli Heckmann.
Bulles de pensées
L’important dans ce jardin, c’est de jouer le jeu proposé : couper un fil de laine et le nouer à la structure de branchages, là où il reste encore de la place… Des fils de laine comme autant de milliers de pensées entremêlées. Nouer des fils de laine ou de coton (des quipus) de formes et tailles différentes était une technique inca pour représenter des nombres. J’ai noué mon fil de laine (avec une pensée très particulière et secrète) avant de parcourir ce jardin qui, à mon avis, se serait bien passé de décors superflus comme la baignoire glouglou rose et les vieux objets parsemés ici et là…
Les concepteurs et réalisateurs sont italiens : Giorgio Broccardo, ingénieur en Génie mécanique ; Daniela Donisi, architecte, illustratrice ; Alice Galbiati, anthropologue et opératrice en orthothérapie ; Luca Caprotti, jardinier, apiculteur et opérateur en orthothérapie ; Paolo Casarin, jardinier et arboriculteur.
Le palmarès de l’édition 12018
- Prix de la Création pour Dans les bois. Phoebe Lickwar, Matthew Donham, Hannah Moll et Andersen Woof qui ont remarquablement su répondre au thème du Festival, avec un jardin d’une grande efficacité visuelle, évoquant l’univers de José Louis Borges, jardin tout à la fois innovant et excellemment végétalisé.
- Prix Design et idées novatrices pour Le livre de sable issu du travail des deux collectifs “Moonwalklocal” et “Paysagistes sans frontières” qui ont su créer un jardin singulier et contemporain d’une grande efficacité visuelle, exclusivement composé de végétaux de dunes et de sable.
- Prix Jardin transposable pour Dans ma bulle, inventé par Delphine Esterlingot et Hervé Paillot, dont les visiteurs peuvent s’inspirer pour créer ou sublimer chez eux leur propre jardin.
- Coup de cœur au jardin La possibilité d’une île créé par le concepteur allemand Ulli Heckmann en référence au roman éponyme de Michel Houellebecq.
- Prix Palette et harmonie végétales pour Entrez dans la pensine, très beau travail de l’équipe de concepteurs composée de Bérengère Lecat et Stéphane Larcin, qui ont su réaliser, avec harmonie et subtilité, un jardin composé d’une exceptionnelle diversité de plantes, pour une promenade qui allie découverte et émerveillement, évoquant l’univers d’Harry Potter.
Infos pratiques sur le Festival international des jardins à Chaumont-sur-Loire c’est PAR ICI !