Depuis la loi Labbé entrée en application le 1er janvier 2017 en France, les produits phytosanitaires sont bannis de l’entretien des espaces verts. Les cimetières sont concernés, enfin leurs allées et leurs entre-tombes. Car si certaines tombes accueillent uniquement du lichen, de la mousse et des fleurs artificielles, d’autres sont habillées de fleurs fraîches, d’arbustes. Quelques exemples de vert dans les cimetières d’ici et d’ailleurs…
Les roses de Nijinsky
Cimetière Montmartre. 22e division. Ici git le danseur Nijinski, né en 1889, à Kiev. Étoile incontestée des Ballets russes, il en est licencié pour avoir dansé devant la famille impériale en maillot moulant et justaucorps court. Nijinski brise les codes académiques du ballet, brille dans “Le Sacre du printemps”, “L’après-midi d’un faune”… Après avoir été fait prisonnier en Hongrie pendant la Première Guerre mondiale, il retrouve les Ballets russes pour une tournée en Amérique du Nord, et danse sur “Till l’Espiègle” de Richard Strauss. Les premiers signes de sa schizophrénie apparaissent à cette époque. Il disparaît en 1950, après 30 ans de séjours en cliniques ou hôpitaux psychiatriques.
La sculpture (bien aimée des pigeons…) qui orne sa tombe le représente dans son costume de “Petrouchka”. Régulièrement, des ballerines viennent déposer sur la tombe leur chaussons et glisser dans sa main des roses fraîches.
Se souvenir parmi les fleurs
Algérie, cimetière musulman de Beni Saf, dans l’Ouest oranais. D’un côté de la ville, le cimetière français peu entretenu, planté de grands cyprès austères. De l’autre côté, le cimetière musulman de Beni Saf où les tombes souvent blanches, parfois peintes en bleu, se font oublier dans une marée de fleurs sauvages, de géraniums vivaces, d’aéoniums. Des stèles émergent, d’autres se cachent derrière de larges touffes de fleurs blanches et jaunes, des palmiers, des oliviers, des chardons, du blé échappé des champs non loin… Du vert dans les cimetières et de la poésie pour aider à oublier le chagrin.
Dalida, le soleil de Montmartre
La chanteuse repose au cimetière Montmartre depuis 1987, non loin de sa maison de la rue d’Orchampt où elle se donne la mort le 3 mai. Sa tombe, encadrée de pots où poussent des buis, est fleurie en permanence par des fans inconsolables. Au centre du monument funéraire, une statue de la star est un rappel aux origines égyptiennes de Yolande Gigliotti dite Dalida, née au Caire. Sa silhouette se détache sur une plaque de marbre noir gravée d’un soleil et de ses rayons. Dans l’éclat de Râ…
Du vert, du blanc et de la lave
Entre des collines d’aspect lunaire s’étend un village-oasis, celui de Haria, au nord-est de Lanzarote, aux îles Canaries. Le haut d’une de ces collines est occupé par le cimetière de la ville, cerné par des murs blanchis à la chaux. Un cimetière où se répondent des tombes simples et des tombeaux de marbre disposés sur plusieurs hauteurs. À l’exception d’un laurier-rose jetant ses branches fleuries par-dessus un mur blanc, tout ici se conjugue en deux couleurs : entre les tombes blanches poussent palmiers, crassulas, yuccas, araucarias, grandes euphorbes. Le sol, lui, crisse sous les pieds. La pouzzolane locale (Lanzarote est une île volcanique) recouvre tout, y compris les entre-tombes qui accueillent des tout petits disparus au pied d’une chapelle.
Des cosmos et Fernand Raynaud
Le 28 septembre 1973, le 22 à Asnières ne répond plus. Le comédien Fernand Raynaud trouve la mort au Cheix-sur-Morge, dans le Puy-de-Dôme. Il roule vite et sa Rolls s’encastre dans le mur… du cimetière communal après une perte de contrôle et un choc avec une bétaillère. L’humoriste, toujours en retard, roulait à vive allure pour arriver à Clermont-Ferrand, sa ville natale, où il comptait à 47 ans, annoncer la fin de sa carrière. Aujourd’hui, une plaque bordée de fleurs annuelles et posée sur le mur rappelle sa disparition tandis que dans le champ à côté du cimetière voltigent des centaines de fleurs de cosmos…