Emblématique des îles lointaines ou pas, des pays chauds comme l’Espagne, le Brésil, la Thaïlande, et de la Côte d’Azur, le bougainvillée nous fait tous rêver… Où et comment le cultiver ? Peut-on imaginer avoir cet arbuste exotique au nord de la Loire ?
La découverte du bougainvillée au Brésil
En juin1767, le navire l’Étoile commandé par le Sieur de Bougainville jette l’ancre devant Rio de Janeiro au Brésil. Il est rejoint par la frégate la Boudeuse. Les deux navires sont alors en plein tour sur monde, une mission confiée par le roi Louis XV.
Philibert Commerson, le naturaliste de l’expédition, et « son » domestique Jeanne Barret, descendent à terre et se lance dans l’exploration de la flore de la région de Rio. C’est lors d’une de ces courtes expéditions qu’ils découvrent « une plante admirable aux larges fleurs d’un violet somptueux ». La plante est baptisée Bougainvillea en hommage au capitaine.
L’exemplaire collecté par Philibert Commerson est conservé dans l’herbier national français au Museum d’histoire naturelle de Paris.
La plante est naturellement présente en Colombie, au Pérou, et en divers lieux du continent sud-américain.
Des fleurs… qui ne sont pas des fleurs !
Le bougainvillée appartient à la famille des Nyctaginacées qui comprend de nombreuses espèces, mais peu sont ornementales. Les parties colorées des bougainvilliers ne sont pas des fleurs, mais des bractées (pièces florales qui se trouvent à la base de l’inflorescence et qui entourent la base du pédoncule). La fleur, c’est le petit tube souvent de couleur ivoire au centre de la bractée.
Comment réussir la plantation d’un bougainvillée
Choisissez-lui un emplacement au chaud contre un mur ou une façade. Au sud, au sud-est ou au sud-ouest.
Faites un bon trou. Mélangez la terre extraite avec du terreau à base de tourbe blonde. Au fond du trou, mettez une bonne couche de matériau drainant (graviers, pouzzolane de grosse granulométrie), billes d’argile, tessons de poteries…). Ces éléments vont permettra d’aérer, de drainer, de ne pas retenir l’humidité en période hivernale.
La première année, arrosez la plante pour l’aider à bien s’enraciner (arrosez le soir après les grosses chaleurs, pas dans la journée). Observez le bougainvillée, si ses feuilles flétrissent un peu, arrosez. Il vous montre qu’il a soif. Dès la deuxième année, le bougainvillée sera en mesure de se débrouiller tout seul. Gardez votre arbuste loin d’un arrosage automatique, il recevra trop d’humidité.
Des bougainvillées en dehors de la Côte-Azur, c’est possible ?
Oui, mais pas en pleine terre, il ne faut pas trop rêver ! Un bougainvillée a besoin de soleil et de chaleur pour produire ses bractées colorées.
La première question à se poser : « Ma région, mon jardin, sont-ils en capacité climatique d’accueillir un bougainvillée ? » Même si le réchauffement climatique donne l’espoir de cultiver ces arbustes en dehors de la Côte d’Azur, il faut garder en tête que la plupart des bougainvillées gèlent à 0°C…
Les bougainvillées les moins frileux
-‘Violet de Mèze’ : la souche résiste à -8°C et même à -10/-12°C lors d’un bref gros coup de gel. Voir ICI notre article consacré à cette variété.
-Les B. ‘Sanderiana’ résistent jusqu’à -2/-3°C. Tout dépend de la durée du gel et des conditions de ce gel. Un gel humide est beaucoup plus offensif qu’un gel sec. D’où la nécessité de bien drainer le pied de la plante.
Peut-on cultiver un bougainvillée en intérieur ?
Non, mauvaise idée ! En intérieur, le bougainvillée trouvera la lumière et la chaleur qu’il aime, mais pas la fraîcheur qu’il apprécie la nuit. Il a besoin d’une température un peu plus basse la nuit pour être en forme. Or, l’hiver, nous avons tendance à chauffer nos maisons ou appartements autant la nuit que le jour, ce qui ne convient pas à l’arbuste.
Si vraiment, vous voulez tenter l’expérience, voici le conseil de Marie Levault (Ets horticoles du Cannebeth) : « Installez l’arbuste derrière une baie vitrée. Le jour, il recevra beaucoup de lumière. La nuit, grâce au pont thermique de la vitre, il ressentira un peu la fraîcheur. » Quoiqu’avec les nouvelles méthodes d’isolation, l’astuce pourrait ne pas fonctionner…
Faut-il tailler un bougainvillée ?
Attendez qu’il soit suffisamment vigoureux pour prendre le sécateur. La meilleure période ? La fin de l’hiver ou le début du printemps. Les tailles avant l’hiver ont tendance à affaiblir la plante qui est alors en descente de sève. Et quand la sève descend, la vitalité est atténuée. Mieux vaut intervenir quand la sève remonte. Là, vous pouvez éliminer des bouts de branches abimées ou gelées. C’est plutôt une taille de propreté où parce qu’il peut être gênant dans un passage.
Si vous taillez avant l’hiver, l’arbuste mettra toute son énergie à produire de nouvelles branches et il sera beaucoup moins fleuri.
En hiver, paille et couverture
Le mulch retient l’humidité et ça, le bougainvillée n’aime pas. En hiver, il faut donc protéger son pied avec de la vraie paille. La paille est une vraie doudoune : le pied de l’arbuste bénéficiera de 3 à 5°C par rapport à l’extérieur. Laissez la paille en place tout l’hiver pour protéger ses racines.
Autre conseil précieux de Marie Levault : « Ne couvrez pas les parties aériennes avec un voile d’hivernage. En installant cette protection, surtout si vous la laissez en place sans l’ouvrir pendant plusieurs semaines, vous allez créer un effet de serre dès qu’il fait du soleil et apporter de l’humidité à l’intérieur de cette protection. C’est un peu comme si votre bougainvillée habite dans un K-way ! »
En cas de gros coup de froid ou de gel annoncé, mieux vaut entourer les parties aériennes du bougainvillée avec une bonne couverture de laine tenue avec des épingles à linge, tout simplement. Ce manteau lui tiendra bien chaud et permettra de gagner là aussi quelques degrés. Le lendemain, dès qu’il fait plus chaud, enlevez la couverture. Vous allez ainsi garder toute la vitalité de votre branche maîtresse (elle n’aura pas besoin de se dépenser pour repousser l’année suivante) et garantir une belle floraison.
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Faut-il palisser le bougainvillée ?
C’est préférable pour l’aider à rester contre une façade ou un mur et lui éviter de plier en cas de gros coup de vent. Contentez-vous d’accrocher les branches maîtresses sur un solide treillage ou des chevilles fichées dans le mur. Les petites branchettes n’ont pas besoin d’être tenues.
Le bougainvillée a-t-il des ennemis ?
Au jardin, on peut parfois observer des attaques de pucerons, mais si votre jardin est riche en biodiversité, les prédateurs des pucerons règlent le problème à votre place. Si les pucerons sont très nombreux et que les prédateurs sont aux abonnés absents, pulvérisez un produit à base de savon noir.
En pot, ce sont plutôt les cochenilles qui élisent domicile sur la plante et elles sont plus difficiles à déloger que les pucerons. En cas de grosse attaque, commencez par retirer toutes celles que vous voyez. Puis pulvérisez un mélange d’eau, de savon noir et d’alcool à brûler (pour 10 L d’eau, 100 ml de savon noir et 1,5 l d’alcool à brûler). Vous devriez être tranquille.
Une plante parfaite pour la véranda
Le bougainvillée adore vivre dans une véranda ou un jardin d’hiver. Il a alors tout ce qui lui convient : la chaleur et la lumière dans la journée, de la fraîcheur la nuit.
Pour une culture en véranda, choisissez des variétés adaptées, pas trop poussantes et très florifères : ‘Barbara Kars’ (rose fuchsia en véranda, plus rouge en extérieur, car elle « bronze » avec le soleil !), ‘Blush’ aux bractées blanches plus ou moins teintées de rose (on l’appelle aussi ‘Sakura’), ‘La gamme ‘Flamenco’ est également peu poussante, pas besoin de tuteurer les plantes.
A-t-il besoin d’engrais ?
En pleine terre, ce n’est pas la peine. En pot, le bougainvillée va apprécier un apport d’engrais. Attention, ne donnez pas cet engrais entre l’automne et la fin de l’hiver quand la sève descend. Le bougainvillée entre alors dans une espèce d’hibernation.
Marie Levault : « Quand une marmotte hiberne, elle n’a pas faim ! Pour le bougainvillée c’est la même chose ! Ne lui donnez pas à manger quand il « dort ».
Le stress du bougainvillée en pot
La plante en pot pique un gros coup de stress à deux périodes de l’année : l’été, quand il quitte la véranda pour rejoindre le jardin ; l’automne, quand on le rentre. Il subit alors un choc thermique, ce qu’il déteste.
Comment donc lui éviter ce stress ? Marie Levault vous conseille de le rentrer (ou de le sortir) quand les températures extérieure et intérieure sont à peu près les mêmes.
Si malgré cette précaution, votre bougainvillée fait la tête et perd toutes ses feuilles, pas de panique. Il vous montre son stress. Surtout, surtout, ne vous jetez pas sur l’arrosoir ou sur de l’engrais. Il est comme nous : quand on a une crise de foie, on n’a ni faim ni soif ! Il n’a plus de feuilles, cela signifie qu’il ne transpire plus. Il n’a pas besoin d’eau. Laissez-le tranquille et surveillez-le. Dès que vous voyez des bourgeons de feuilles apparaître, reprenez les arrosages.
Bougainvillée – Fiche de culture
- Famille : Nyctaginacées
- Type : arbuste à feuillage persistant ou semi-caduc.
- Plantation en pleine terre : pas avant la fin du printemps.
- Utilisation : pleine terre, contre un mur ou une façade, patio, treillage, pot.
- Végétation : compacte en bac, jusqu’à 10 m contre un mur !
- Exposition : sud, sud-ouest, sud-est.
- Sol : bien drainé.
- Arrosage : régulier la première année.
- Engrais : engrais complet, seulement en pot.
- Rusticité : O°C pour la plupart des variétés. – 2 à – 3°C pour les sanderiana. – 8°C pour la variété ‘Violet de Mèze’.
- Culture en pot ? Oui.
- Multiplication : par marcottage au sol ou en aérien (trop compliqué par bouture pour les amateurs).
Les espèces qu’on trouve chez nous
Bougainvillea glabra dont sont issues de très nombreuses variétés.
B. spectabilis.
B. x buttiana, obtenu par croisement entre B. glabra et B. peruviana.
Un problème ? Une solution !
Un bougainvillée cultivé en pot peut parfois vous faire des misères. Que faire ?
- Ses feuilles tombent en été ? Il souffre d’un manque de lumière (il doit en recevoir au minimum 5 heures par jour).
- Les feuilles jaunissent ? Vous l’avez trop arrosé. Videz la soucoupe si besoin. Laissez bien sécher le substrat avant de reprendre tranquillement les arrosages.
- La croissance de votre bougainvillée ne « décolle » pas ? Rempotez en n’oubliant pas d’installer une bonne couche de drainage au fond du pot.
Comment le multiplier
Par marcottage au sol
Au printemps, choisissez une grande tige souple, plaquez-la sur la terre après avoir pratiqué une petite incision au-dessous de la tige. Faites tenir la tige avec des crochets ou des épingles à cheveux. Mettez un peu de terre par-dessus, maintenez humide. L’automne venu, la marcotte peut être séparée du pied mère.
Par marcottage aérien
Sélectionnez 10 cm sur une tige droite, enlevez toutes les feuilles de la partie choisie. Dénudez la tige (enlever l’écorce) sur 1 cm. Prenez un plastique opaque pour faire un manchon le long des 10 cm sélectionnés. Attachez le bas du manchon avec de la ficelle. Remplissez le manchon de mousse ou de terreau humide. Attendez l’automne, vérifiez si des racines se sont bien développées. Si oui, coupez sous le manchon et repiquez la bouture dans un pot.
Nos variétés préférées
B. specto-glabra ‘Violet de Mèze’ : voir notre fiche.
‘Mini thai Pink’ : un drôle de bougainvillée à l’allure de bonsaï, port buissonnant, pas besoin de tuteur. Parfait pour les petits espaces.
‘Marie Blanc’ : bractées blanc vert parfois striées de rose. Floraison au début de l’été.
‘Barbara Kast’ : le grand classique. Cette variété ancienne offre des bractées fuchsia. Très florifère.
‘Pitchoune Orange’ : croissance modérée. Bractées orangées puis rosées. Idéal en pot.
‘Sanderiana Sophie’ : port très compact, florifère. Bractées violet foncé presque grenat.
‘Verone’ : variété à floraison précoce (dès mi-mars). Bractées recourbées rouge puis rose violine. Variétés pour patios et bacs.
‘Yannis Delight’ : bractées blanches et roses, feuillage panaché de vert surtout sur les jeunes feuilles
‘San Diego Rouge’ : variété vigoureuse, superbe feuillage panaché, grosse bractées rouges.
Éts horticoles du Cannebeth, spécialistes du bougainvillée
Marie et Philippe Levault ont la passion des bougainvillées. Ils les produisent dans leur pépinière du Cannebeth, à Mauguio, dans l’Hérault, et occupent d’une superbe collection de bougainvillées agréée par le CCVS (Conservatoire des collections végétales spécialisées).
Pour Marie, « c’est comme avoir une famille nombreuse ! Chaque arbuste est différent, mais il faut vraiment s’y connaître parfois pour différencier deux variétés. Comme nous connaissons le tempérament de chacun, nous pouvons travailler sur des hybridations. Cela nous donne aussi la possibilité d’obtenir des bougainvillées pour des usages différents : pleine terre, bac, petits espaces… On s’intéresse beaucoup aux variétés trapues qui peuvent pousser en potées et même en jardinière pour offrir de l’exotisme sur les terrasses et les balcons. » Chaque jardinier peut donc aujourd’hui trouver son bougainvillée.