L’autochrome est le nom du procédé photographique en couleurs breveté le 17 décembre 1903 par les frères Auguste et Louis Lumière et mis au point dans leurs “ateliers de la fécule” par Gabriel Doublier.
Louis Ducos du Hauron en avait formulé le principe, dès 1869. Il consiste à recréer les couleurs par l’intermédiaire d’une trame microscopique constituée de microfiltres colorés (Nous vous invitons à consulter la page Wikipédia de ce brillant inventeur).
« Autochrome » est également le nom du support ; celui de la diapositive qui montre des images positives sur plaques de verre.
Cette technique continue d’être utilisée pour les écrans de télévision ou d’ordinateur.
L’intérêt de l’autochrome réside dans l’obtention du cliché en une seule prise de vue, plutôt que trois précédemment, que l’on superposait.
Un grossissement d’une plaque autochrome qui montre un réseau de fécules teintées (7000 grains par mm2). On observe 3 types de grains : le bleu, le rouge et le vert.
Une invention à base de pomme de terre
Cette géniale invention vient de l’utilisation de fécule de pomme de terre teintée, permettant de capter et filtrer la lumière. La plaque de l’autochrome est recouverte d’une mosaïque de minuscules grains de fécule de pomme de terre teintés en rouge orangé, bleu-violet ou vert, puis d’une pellicule photosensible en noir et blanc. La finesse des grains sélectionnés et leur distribution, somme toute, plutôt aléatoire, offre un rendu très esthétique à l’époque, influencé par le pointillisme et l’impressionnisme.
Et pourquoi de la pomme de terre ?
On vous sent venir. Pourquoi ne pas utiliser de la carotte, du navet, du poireau ou du céleri ? Parce qu’elle contient de l’amidon. Une substance très stable lorsqu’elle est transformée et facile à teinter.
Très utilisée en cuisine sous forme de poudre, la fécule de pomme de terre est l’autre nom de l’amidon. On l’obtient après quelques lavages et séchages successifs. Les frères Lumière ont réussi à écraser davantage les grains (ils mesurent entre 10 et 20 microns, soit 7000 à 7500 grains par mm2) et à les colorer. Après coloration, on tamisait à nouveau les grains puis on les mélangeait dans des proportions précises pour qu’il n’y ait pas de dominante de couleur ; on les étalait ensuite à l’aide d’un pinceau sur une plaque. Enfin, les techniciens “comblaient” les minuscules espaces entre les grains avec du charbon de bois, lui aussi réduit en poudre pour empêcher la lumière de passer (voir schéma ci-dessus).
Les plaques autochromes se vendaient ensuite prêtes à l’emploi.
Malgré le vernis qui les protège, les autochromes finissent par s’abîmer, souvent à cause d’une forte hygrométrie ou d’une exposition répétée à la lumière (ne jamais les coller devant une fenêtre !). Sur la photo ci-dessous, les couches rouge et verte ont disparu. Ne reste que la bleue. La restauration est alors impossible.
Un véritable succès commercial
La plaque « Autochrome Lumière » fut développée et commercialisée seulement à partir de 1907, et connut immédiatement un grand succès, même si elle était destinée à des professionnels ou des personnes fortunées. Les laboratoires Lumière fabriquaient jusqu’à 6000 plaques par jour en 1913.
Quelques autochromes
Les teintes pastel et une légère granulation dues à la fécule continuent de séduire les observateurs…
Quelques collections et expositions (passées et futures)
De nombreux autochromes y sont conservés et régulièrement exposés ou consultables sur leur site.
Le château de Tours (37) – La collection AN / D’autres autochromes de l’expo à voir ICI
Le Musée des Beaux-Arts – Agen (47) – Hommage à Louis Ducos du Hauron
L’Institut Lumière (69) – “Les autochromes”
Le musée d’Orsay – Paris (75) – Les autochromes
Et notamment la collection : “Etienne Clémentel”
Le Centre Régional de Documentation Pédagogique de l’Académie de Strasbourg (CRDP) – Strasbourg (67) – Les autochromes
La collection publique départementale des Musées de l’Ain – Bourg-en-Bresse (01) – La collection Jean-Baptiste Tournassoud
Le musée de Bretagne – Rennes (35) – Les autochromes
La collection Julien Gérardin à l’ENSAD – Nancy (54) – ICI
Le ministère de la Culture – Paris (75) – Le patrimoine photographique de l’État
Et notamment les autochromes de la guerre : Autochromes de la guerre 1914-1918
Le ministère de la culture – Paris (75) / Plateforme Ouverte du Patrimoine (POP) – Les autochromes
La donation Jacques Henri Lartigue – Charenton-le-Pont (94) – Les autochromes
Le musée français de la Photographie – Bièvres (91) – Quelques autochromes à rechercher : ICI
Le musée basque et de l’histoire de Bayonne – Bayonne (64) – Le Pays Basque en couleurs. Autochromes, 1907-1935
(Du 14-07-2023 au 14-01-2024)
La plus grande collection est française
Albert Kahn, un banquier philanthrope, né en 1860, en Alsace allemande, à l’époque, a créé et rassemblé le plus important fonds d’autochromes au monde intitulé « Archives de la Planète ». Aujourd’hui, la collection est riche de 72000 plaques.
Fervent humaniste, pacifiste et défenseur de la planète, il a financé un grand nombre d’expéditions photographiques à travers le monde. Son idée était simple : Faire découvrir les paysages et les habitants devaient rapprocher les Hommes. Une belle utopie !
Demeurant à Boulogne, il achète peu à peu les terrains voisins jusqu’à constituer un domaine de 4 ha. Toujours dans l’esprit de mélanger les cultures, il y fait construire plusieurs jardins paysagers d’inspirations étrangères et même une forêt vosgienne, afin de lui rappeler son enfance.
Après sa faillite en 1932, l’ensemble est racheté par le département de la Seine qui en prolonge la vocation. La propriété, devenue le musée départemental Albert-Kahn, est inscrite en 2015 à l’inventaire des monuments historiques.