Le sainfoin cultivé, adoré des abeilles et des bombyx, est une légumineuse fabuleuse. Cette plante fourragère, mellifère, n’a que des qualités : une belle floraison, une capacité à rester verte tout l’hiver, une grande aptitude à améliorer la structure du sol et la ressource en azote. Avec d’autres agriculteurs de l’Aube, Pascale Gombault, a relancé la filière sainfoin en France et commercialise un miel absolument exquis.
Hortus Focus. Pourquoi le sainfoin a-t-il disparu de nos champs au siècle dernier ?
Pascale Gombault. Il n’a pas survécu à l’intensification de l’agriculture dans les années 50. J’ai pu en voir, petite, sur la ferme de mes grands-parents, mais la culture a été peu à peu abandonnée par tous. Il y a une bonne raison à cela : le sainfoin se fiche des engrais. Quand les engrais ont submergé l’agriculture, la plante n’a pas répondu. On pense que c’est la raison principale de sa disparition des assolements français. Personne n’avait alors conscience de l’intérêt et des qualités de cette plante (Onobrychis viciifolia).
Existe-t-il un sainfoin ou des sainfoins ?
Il en existe différents types, en fonction des territoires. Et en Europe, on en trouve également plusieurs espèces.
Comment reconnaître le sainfoin cultivé ?
C’est une plante qui reste bien verte en hiver, ce qui fait le bonheur des chevreuils et des lapins. Elle pousse très vite au printemps. On la coupe en fourrage. Puis elle repart en fleurs – une belle floraison très rose – et là, elle fait le régal des abeilles et de nombre d’autres pollinisateurs. Si vous en semez, vous pourrez voir non seulement des abeilles, mais également des bombyx, mais aussi différentes espèces de carabes qui adorent la plante.
C’est donc une bonne plante pour faire du miel ?
Le miel de sainfoin a fait la réputation du Gâtinais au XIXe siècle. Le sainfoin n’étant plus cultivé, le miel du Gâtinais a disparu. Avec la filière sainfoin, initiée par des agriculteurs pour des éleveurs, nous cultivons 700 hectares de cette plante principalement en Champagne, mais également en Bourgogne et dans le Périgord. Il existe un frein à la culture du sainfoin : cette plante pousse uniquement en terre calcaire, aride (d’où sa résistance à la sécheresse). Nous produisons aujourd’hui nos miels, que les amateurs reconnaissent comme des miels d’exception. Une petite goutte… de miel dans les 30 000 tonnes de produits importés chaque année en France.
Pourquoi te bagarres-tu pour la renaissance du sainfoin ?
En tant qu’agricultrice, il me faut penser demain. L’agriculture, c’est un temps long . Il nous faut imaginer des modèles résilients pour demain, face à la sécheresse, face à l’absence de solutions chimiques aussi bien pour les animaux ou pour les cultures. Pourquoi ne pas utiliser cette plante au talent agronomique certain, le sainfoin peut nous aider à faire pousser des céréales dans un échelon de rotation. Pourquoi ne pas avoir recours aux vertus antiparasitaires du sainfoin pour limiter chez nos animaux les solutions médicamenteuses ? Et comment ne pas voir l’apport du sainfoin dans le maintien et le développement de la biodiversité ?
Comment l’utilises-tu dans ton exploitation ?
Je l’intègre dans nos rotations de culture, car il répond à la fois à des besoins économiques et agronomiques de mon exploitation. Le sainfoin permet d’améliorer la ressource azote, mais également la structure des sols. Ses fleurs permettent aux abeilles de fabriquer un excellent miel et nous en donnons à nos animaux.
Peut-on en faire pousser dans son jardin ?
Oui,je vous y encourage si vous jardinez en terre calcaire. Vous aurez le plaisir d’observer le ballet des pollinisateurs. Après la floraison, fauchez-le et utilisez-le en paillage. Ne l’arrachez pas ! C’est une vivace bisannuelle, donc vous pourrez la garder longtemps.
Le miel de sainfoin est un miel d’exception. Vous pouvez en trouver sur le site de Sainfolia. com, des miels de sainfoin bio produits par le Rucher de Trouans, le rucher de Lhuitre, le rucher de Vermoise. Vous avez de la chance… On n’a pas tout mangé !