L’aventure de la route des épices – Conte 2/3

Bonjour petit Padawan du jardin !

Aujourd’hui, la suite du joli conte pour partir à la découverte des épices et aromatiques du jardin et de la cuisine. Suis les aventures de Petit Li Hou et de Mr Feng dans leurs nouvelles aventures.

 

 

 

(Chapitre troisième)

De Xi’an à Lanzhou, aux portes du Tibet.

Monsieur Feng avait deux fils.

Le cadet, un jeune homme de vingt ans aux allures de mandarin était un lettré et un redoutable négociateur. Quand la caravane chargée d’épices de monsieur Feng était annoncée, les marchands de la province du Shanxi devenaient soudain fébriles eux si calmes à l’accoutumée. C’était à la fois une heureuse nouvelle et un terrible tourment.

Ils allaient pouvoir acheter les meilleures épices venues du Guandong et en les revendant, faire de gros bénéfices. Mais ils savaient par avance que ceux-ci seraient amputés par l’intransigeance de « petit Feng » dont la réputation s’était répandue jusqu’à Xian et même au-delà jusqu’à Lanzhou.

À Xi’an, les marchands savaient que des épices de la meilleure qualité arrivaient avec la caravane. Mais ils devraient les acheter au prix fort.

De même, aux nombreux péages qui jalonnaient la route, les fonctionnaires, chargés de percevoir les taxes, étaient obligés d’en rabattre. Le jeune Feng payait la plupart du temps en épices (on dira bientôt – en espèces). ll payait de la même façon les services rendus par les bateliers qui aidaient à passer les rivières ou à traverser les lacs et les lagunes.

L’aîné était immense et fort comme un buffle. Il avait été officier dans l’armée du Shanxi. Il veillait, à l’aide d’une discipline toute militaire, à ce que la sécurité des convois soit sans faille.

Ces précautions n’étaient pas inutiles bien que la route vers Xi’an soit à peu près sans danger. Elle traversait un territoire au climat chaud et humide. Partout des paysans s’interrompaient un instant pour saluer le long convoi.

Pas une journée de marche sans qu’on aperçoive un poste de garde ! Cela tranquillisait « frère aîné « comme l’appelait son cadet.

Parfois, au loin un groupe de cavaliers soulevait de la poussière et « frère aîné » posait machinalement la main sur le pommeau de son épée. Il scrutait l’horizon craignant d’avoir à faire à des pillards. Mais rien de mal n’arriva et les cavaliers qui s’approchèrent d’eux au cours du voyage, étaient des musiciens à la recherche d’un bon feu. Ils égayèrent la soirée des deux frères. On parla beaucoup de voyage, on chanta, on raconta des contes et des légendes. On dansa même avec plaisir avant de s’endormir heureux.
L’arrivée à Xi’an fut, une fois de plus une délivrance pour « frère aîné » qui pouvait enfin cesser de surveiller ses arrières.

Idéogramme signifiant “Chameau”

Pour les deux frères familiers des charmes de Hangzhou et de Suzhou, dont la réputation n’était plus à faire, l’arrivée à Xi’an était toujours un moment d’émerveillement. L’ancienne capitale des empereurs Qin était une splendeur. À l’intérieur du rempart, elle avait su protéger les palais des dynasties passées et continuait à élever de nouveaux temples et de nouvelles pagodes.

Qin était l’une des villes les plus actives de Chine et la capitale de la soie. Il n’était pas aisé de s’y retrouver et de s’y glisser avec un convoi de plusieurs centaines de chevaux, de buffles et de chameaux. Tout cela sans en perdre un seul. Aidé de son escouade de cavaliers «frère aîné» veillait.

Le marché de la soie était partout, dans toutes les rues, toutes les échoppes, et même dans d’immenses magasins à plusieurs étages. Le marché aux épices, lui, n’était nulle part ou plus exactement avait été regroupé en un seul lieu séparé de l’activité des soyeux.

Dans une vaste cour ceinte de murs et gardée, les frères Feng firent débâter pour passer la nuit. Dès l’aube, ils repartaient pour Lanzhou où les attendaient les clients de monsieur Feng. Là, frère cadet était chargé de tirer le plus grand profit possible de la vente des épices qui avaient fait déjà tant de chemin.

Lanzhou !

Les Feng n’allaient jamais plus loin. Au-delà, ce n’était plus vraiment le pays des Han. C’était déjà un autre pays.

(Chapitre quatrième)

De Lanzhou à Samarkand

Un voyage de quatre mois à travers l’Asie centrale. Les épices allaient définitivement quitter le pays des Han et les rives du fleuve Jaune pour les hautes terres de Dzoungarie. Là où vivent des Huis, des Tibétains, des Ouïgours, et les insaisissables cavaliers mongols.

 

 

 

Idéogramme signifiant “Marcher”

Madame Bögü, riche héritière d’une dynastie de marchands ouïgours avait bataillé ferme pour garder le contrôle de sa maison de négoce. Elle avait dû, pour cela, épouser le frère de son mari défunt parce qu’alors une femme ne pouvait pas être marchande si elle restait seule.

C’est donc elle qui, avec ses six filles, décida d’acheter les épices de monsieur Feng.

Afin que ses chameliers ne manquent pas le départ annuel de la grande caravane, madame Bögü avait envoyé une trentaine de chameaux et trois de ses filles à Lanzhou pour vérifier la qualité des épices et surtout pour négocier avec le fils cadet de monsieur Feng. Comme chaque année c’était la pierre d’achoppement. Comme chaque année la fille aînée de madame Bögü fit savoir qu’elle acceptait de payer un peu plus cher, mais en échange d’un très gros cadeau en épices.

Les jeunes gens des deux familles s’entendaient fort bien. Ils se voyaient chaque année et « frère cadet » était touché par le charme de la jeune femme qui négociait intelligemment. Un éclat de malice apparaissait dans ses yeux lorsqu’elle faisait baisser le prix et il la trouvait irrésistible.

Marché conclu !

Après avoir quitté Lanzhou pour rallier Turfan, les épices partaient plus d’un mois dans un paysage semi-désertique. La caravane traversait des villages qui peu à peu se transformaient en oasis, jusqu’à la plus belle d’entre toutes. Turfan était un rêve de verdure et de fraîcheur posé au bord du terrible désert du Taklamakan.

Les cent chameaux de madame Bögü y rejoindraient la grande caravane qui en comptait plus de mille. À cet immense convoi, s’ajoutaient deux cents chevaux destinés aux cavaliers-archers enrôlés pour lutter contre les Mongols.

Quatre cavaliers assuraient en permanence la garde rapprochée des coffres contenant le safran ; l’or jaune de l’Inde.

Les chameaux des Bögü étaient les seuls à convoyer des épices. Tous les autres transportaient d’énormes ballots de soie qui dansaient entre leurs bosses au rythme de leur marche. Sans forcer, ces bêtes pouvaient parcourir cinquante kilomètres en une journée, de la première théière du matin à celle du soir. Une journée de marche c’était quatre théières !

Les chefs de la grande caravane avaient choisi la piste du nord qui, en suivant le lit de la rivière Ili en direction de Yining, contournait les Monts Célestes, le Tian Shan.

Certains chameliers, plus aventureux, avaient choisi la route qui, plus au sud suivait le bord du Taklamakan, jusqu’à Kashgar avant de franchir à 4700 mètres le col de Kundjérab pour s’engager dans les terrifiants défilés du Karakorum. Ils avaient l’espoir de rejoindre l’ancienne piste Marco Polo. Entre les pics dont les glaciers étincelaient à plus de 8000 mètres, la piste longeait des gouffres où grondaient des fleuves furieux qui effrayaient hommes et bêtes. Ceux qui avaient choisi ce chemin croyant gagner du temps, quand ils en revenaient, racontaient des histoires à faire dresser les cheveux sur la tête.

La folie hantait leurs yeux.

De Samarkand à Mechhed

Dès leur arrivée à Samarkand, les chameliers de Turfan découvrirent une ville qu’ils ne reconnaissent pas.

Partout on voyait des chantiers de construction ! Il fallait loger une population toujours plus nombreuse depuis que Samarkand était devenue la plaque tournante du commerce entre l’Asie et l’Europe.

Partout de nouvelles tim (ruelles bordées d’échoppes), de nouveaux bazars, de nouveaux caravansérails (qui recevaient les chameliers et les marchandises) dont certains étaient couverts. Les Bögü découvraient, reconstruites après le dernier tremblement de terre, de nouvelles medersas (écoles coraniques), de nouveaux minarets, de nouvelles coupoles recouvertes de majoliques bleu turquoise, des mosquées dont la décoration raffinée contrebalançait le gigantisme. Partout de nouvelles fontaines.

 

Samarkand attirait comme un aimant.

 

Tadjiks, Kirghizes, Chinois, Turcs, Turkmènes, Arabes, marchands venus du nord depuis le lointain khanat de Kazan ou même de Nijni-Novgorod, tous ceux qui étaient décidés à vendre et à acheter se retrouvaient dans la capitale des Ouzbeks.

C’est à Samarkand que se rejoignaient les routes des épices venues du nord et celles venues du sud. C’est à Samarkand que, les caravaniers ayant échappé à l’enfer du Karakorum, retrouvaient leurs amis venus par la route du nord. À Samarkand, ils rencontraient aussi les marchands venus d’Ormuz ou d’Arabie heureuse.

Profitant du voyage et de la protection des grandes caravanes, des médecins, des mathématiciens, des poètes se rendaient à Samarkand pour discuter, échanger idées, onguents, jolis mots et formules mathématiques, et faire progresser le monde.

Les différents bazars étaient spécialisés. Ici on achetait et vendait de la soie et rien d’autre, là des épices, ailleurs des tapis, plus loin sur un autre marché, les bijoux en or de l’artisanat tadjik.

Les Bögü avaient trouvé à se loger dans le bazar aux épices et confié leurs chameaux à la garde d’un caravansérail tout proche.

Gouliandar restait perdue dans ses pensées qu’elle avaient laissées auprès de son jeune amoureux. Elle espérait que fils cadet la demande en mariage bientôt. Ses soeurs se moquaient d’elle et lui disait :

– Gouliandar, tu ne reconnaitrais pas de la cannelle tant tu es dans la lune !

La jeune fille n’y prêtait aucune attention. Elle fila au bazar de soie se choisir le plus beau tissu possible pour préparer sa prochaine rencontre avec Fils cadet.

Comme d’autres, les marchands de Turfan réservaient la part la plus mince de leurs sacs d’épices aux marchands de Samarkand et de Boukhara. Les Ouzbeks aimaient cuisiner et se soigner avec les épices à peine arrivées. Mais la majeure partie des ballots, après d’âpres négociations autour des théières fumantes, reprendrait la route pour Mechhed dans le Turkestan. Avant de regagner Turfan, les Bögü iraient de bazar en bazar pour faire le plein de cadeaux, mais surtout de marchandises qu’ils négocieraient à leur retour : tapis de Boukhara, caftans ouzbeks, bijoux turkmènes, lapis-lazuli du Tadjikistan, bottes et sacs en cuir venus du pays tatar et surtout, ce dont raffolait la fille de Madame Bögü, les somptueux velours de Lyon ainsi que les cristaux de Venise.

La vente des épices avait été si profitable que la jeune femme prenait le temps de profiter de la ville avant de donner l’ordre du retour.

La grande caravane, quant à elle, avait quitté Samarkand avant le lever du jour.

La route de Mechhed ne présentait qu’un seul danger mais totalement imprévisible. Il venait des guerres incessantes que se livraient des chefs de guerre pour la possession de royaumes ou de petits émirats que balaierait la première tempête de sable.

Dans ce pays sans nom ni frontières, ces petits rois pillards étaient capables pour leur seul bon plaisir de retenir la caravane plusieurs mois ou pire de s’approprier les épices.

À suivre…

Retrouve le premier épisode en cliquant ICI

 

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