Ce très beau livre rassemble près de 300 jardins contemporains du monde entier, sélectionnés avec soin et présentés par de nombreux contributeurs spécialistes, tels que Richard Aitken, Matt Biggs, Matt Colllins, Joanna Fortnum, Clare Foster, Stephanie Mahon, Tovah Martin, Michael McCoy, Paul Redman ou encore Tony Spencer. À une période où le jardin a pris de plus en plus d’importance dans nos vies, à la lecture de cet ouvrage, les passionnés et professionnels y trouveront de riches exemples des nouvelles tendances en matière d’aménagements paysagers.
Renouveau du jardin avec une importance donnée aux plantes
Le texte introductif nous plonge dans le renouveau des jardins au cœur des différents pays. Il est écrit par Annie Guilfoyle, créatrice de jardins et conférencière internationale basée dans le West Sussex, au Royaume-Uni.
La grande influence de Piet Oudolf sur la nouvelle génération de paysagistes est manifeste. Fin des années 1970 et début des années 1980, une renaissance horticole s’est mise en place avec The New Perennial Movement qui prônait une approche naturaliste. Les créateurs de jardin reconsidèrent l’importance d’une variété de plantes et tendent à imiter la nature. En Allemagne également, grâce au mouvement Gartenschau, qui est apparu après la guerre, les parcs sont caractérisés par la présence de plantes vivaces et de graminées.
Jardin ?
Le mot de jardin peut-être actuellement réinterrogé dans la diversité des formes qu’il peut prendre, nous dit l’autrice. La définition qu’on peut lire dans le titre de l’ouvrage d’Elisabeth Beazley, Design and Detail of the Space between Buildings (Conception et examen de l’espace entre les constructions) est pertinente. Le jardin s’insère de plus en plus entre des immeubles, et fait partie de projets de réhabilitation de complexes urbains.
Robustesse et tendances
Annie Guilfoyle s’interroge sur l’avenir du jardin quand il est nécessaire de prendre en compte les transformations climatiques. La paysagiste privilégie l’intérêt saisonnier, la durabilité, et les végétaux qui favorisent l’arrivée de la faune et la flore.
Des sites historiques importants, tels que les célèbres serres occidentales des jardins de Loogwood de Pierre S. du Pont en Pennsylvanie, illustrent les nouvelles tendances en matière de création d’aménagements paysagers dans différents contextes.
Le jardin des migrations, une promenade sur le site du MUCEM de Marseille a été confié à l’agence APS avec la collaboration d’Olivier Filippi et de Véronique Mure. Il fait écho aux missions du musée, consistant à la valorisation les culturelles méditerranées. Le choix des végétaux en découle : oliviers, figuiers, grenadiers.
La végétalisation des friches et des sites industriels
Depuis les années 1990, de nombreux paysagistes ont transformé des paysages post-industriels en parcs publics. L’un des plus inspirants est le Landschaftspark Duisburg-Nord en Allemagne, aménagé par Latz + Partners.
En France, le parc André Citroën a lui aussi suscité d’autres réalisations. Gilles Clément et Allain Provost l’ont dessiné avec la contribution des architectes Patrick Berger, Jean-François Jodry et Jean-Paul Viguier .
John Little, paysagiste britannique, expérimente chez lui le jardin «”zéro déchet”, car son sol est composé de sable et de débris de céramique. Les plantes et la biodiversité s’y installent dans un processus de résilience.
Des jardins botaniques
Le jardin botanique australien conçu par Taylor Cullity Lethlean pour une expérience de voyage symbolique est remarquable par son organisation topographique. Il rappelle les paysages de désert, de rivière, d’affleurements rocheux jusqu’un estuaire.
Eden project, est un complexe de deux serres, chacune abritant un biome. La première abrite une forêt tropicale. La seconde accueille le biome méditerranéen. Remarquables par leurs formes en dôme, elles rappellent le système géodésique, rendu célèbre par la Biosphère de Montréal de l’architecte américain Richard Buckminster Fuller.
Jardins de soin et d’écoles
Notons aussi l’importance du jardin comme lieu de soin et de relations entre humains et non-humains. Les jardins prennent de plus en plus de place dans les cours d’école. Et, l’espace éducatif de l’école maternelle Chorafilla à Milan réalisé par Cristina Mazzucchelli stimule l’éveil des jeunes enfants.
Le jardin potager d’Alice Waters au sein d’une école secondaire est intitulé Edible Schoolyard (cour d’école comestible) . Ce projet a notamment inspiré plus de 6500 écoles dans 75 pays différents.
Les jardins peuvent aussi accompagner un processus de guérison. C’est le cas du Maggie’s dundee en Ecosse. Franck Gehry y a conçu un bâtiment blanc, proche du cottage. Arabella Lennox-Boyd l’a enrichi d’un jardin circulaire entouré de plantes odorantes et d’arbres à fleurs, qui encourage le repos, la méditation et la réflexion.
Jardins expérimentaux et innovants
Nombreux sont les jardins où sont menées des expérimentations pour veiller à la santé des sols et à privilégier le moins d’entretien possible.
Dans le jardin de Bill et Diane Mitchell, vous trouverez les plantes xérophiles et ignifuges venues d’Australie-Occidentale.
La Forêt millénaire Tokachi est située sur l’île Hokkaidö. Imaginée par Dan Pearson, paysagiste britannique, elle compose un paysage en quatre zones principales. Un jardin de prairie ornementale, un jardin de terre, un jardin sauvage et un jardin agricole productif.
Little Island constitue un projet véritablement surprenant, réalisé par le designer et architecte britannique Thomas Heatherwic. C’est un parc d’un hectare, situé sur l’Hudson River. Montées sur une série de hauts pilotis, le designer a sélectionné des plantes robustes pour répondre aux conditions difficiles, notamment au vent qu’elles atténuent.
Des jardins d’artistes ou accueillants des sculptures
Dans le jardin créé par Erik Dhont à Bonemhoeve, en Belgique, les œuvres d’art côtoient les plantes et une variété d’essences d’arbres, dont des chênes pédonculés.
Fondé en 2010, le musée de l’Arbre Enea, pensé par Swiss landscape architecte et l’artiste Enzo Enea rassemble plus de 25 espèces. Elles sont mises en scène, encadrées devant un mur en grès italien. Des sculptures d’artistes contemporains entrent en dialogue avec ces êtres vivants âgées de 40 à plus de 100 ans.
Le jardin de l’artiste Marc Nucera, celui créé par Gabriel Orozco se caractérise par des cercles, un motif qui se retrouve dans l’ensemble de son œuvre.
Des contextes insolites
Le jardin trouve désormais sa place dans des lieux inattendus. La Battersea power station, réhabilitée en un ensemble d’appartements, accueille des jardins sur son toit.
Les jardins du siège social d’Apple, réalisés par le paysagiste Andy Sturgeon sont conçus chacun à partir d’un élément.
À Buenos Aires, en Argentine, le projet de l’agence d’urbanisme et d’architecture paysagère Bulla est remarquable. Un toit vert rassemble des communautés de plantes indigènes et crée un lien avec les parcs et l’écosystème fluvial proche. La biodiversité en ville s’accroît progressivement depuis sa création.
Tout passionné peut ainsi faire un tour d’horizon des lieux où règne une pensée paysagère novatrice. Les jardins font en effet partie des modes de vie tant ils permettent à toutes et tous de se connecter à la nature. Et qui dit connexion dit prendre soin et développement de la biodiversité.
Jardins contemporains rassemble les plus beaux les jardins de notre époque
Cet ouvrage a été supervisé par Sorrel Everton, ancienne rédactrice en chef adjointe de Gardens Illustrated et par Victoria Clarke, éditrice chez Phaidon. Une équipe internationale d’experts, dont Richard Aitken, Michael McCoy, Paul B. Redman et Annie Guilfoyle, a fait la sélection de jardins afin de représenter au mieux l’évolution du paysagisme actuel. Annie Guilfoyle, paysagiste et créatrice de jardins de renom, a rédigé une introduction qui explore cette évolution au cours des trente dernières années, en la replaçant dans l’histoire des jardins et en considérant l’impact de ces espaces verts sur notre vie quotidienne.
Aux Éditions Phaidon