À1980 m d’altitude, au-dessus du Lac Léman, en Suisse, le jardin botanique de la Rambertia est aménagé entre deux éperons des Rochers-de-Naye. Créé par des passionnés voilà plus de 120 ans, il est ouvert de juin à septembre. La botaniste Anne-Catherine Monod veille sur lui tous les étés.
Hortus Focus : le jardin a-t-il toujours été à cet emplacement ?
Anne-Catherine Monod : Non, le jardin actuel est la troisième “version”. Le premier jardin était installé un peu plus bas en altitude, non loin d’un lac, mais les plantes n’appréciaient pas le lieu, trop froid et surtout trop humide. Puis il a connu un deuxième emplacement sur une pente au nord. Résultat : les plantes ne poussaient pas ! Enfin, il a été installé à son endroit actuel où il bénéficie d’un côté exposé au sud et d’un côté exposé au nord, ce qui nous permet d’avoir des plantes de toutes origines.
Pourquoi s’appelle-t-il la Rambertia ?
Il a été baptisé en l’honneur d’Eugène Rambert. Ce poète, naturaliste et alpiniste vaudois fut l’un des membres fondateurs, en 1863, du Club alpin suisse.
Quand le jardin est-il accessible ?
En principe, on peut y accéder sans problème à partir de mi-juin, mais tout dépend de la neige. Ce qu’il faut savoir, c’est qu’ici on peut avoir de la neige tous les mois de l’année. À partir de mi-octobre, elle recouvre le jardin.
D’où viennent les plantes installées ici ?
Elles viennent de toutes les régions alpines, donc des zones montagneuses. C’est le mot utilisé, quel que soit le pays d’où les plantes sont originaires. Dans le jardin, la moitié des plantes sont indigènes, l’autre moitié vient du monde entier.
Combien le jardin accueille-t-il d’espèces et certaines sont-elles là depuis très longtemps ?
Nous avons environ 1000 espèces dans cet espace de 3000 m2. Toutes les familles qui se plaisent en altitude sont représentées. Nous connaissons avec certitude deux plantes installées dans le jardin depuis plus de cent ans : un rhododendron et une dryade à 8 pétales (Dryas octopetala).
Quelles sont les plantes emblématiques du printemps ?
L’anémone des Alpes (Pulsatilla alpina) est l’une des reines du printemps avec ses grosses fleurs blanches dont l’extérieur des pétales est bleuté, légèrement duveteux. La soldanelle (Soldanella alpina) est, elle aussi, très présente et tous les visiteurs peuvent admirer ses petites fleurs violettes en clochettes frangées. Il ne faut pas oublier non plus notre petite collection de saules (Salix) dont les bourgeons duveteux sont merveilleux au printemps. Certains sont très vieux et couvrent des morceaux entiers de roche.
Et l’été, quelles plantes peut-on observer ?
C’est la meilleure saison pour observer les plantes, car elles sont toutes en fleurs. Nous avons la chance d’avoir de nombreux edelweiss (Leontopodium alpinum) originaires de Suisses et d’autres pays. Autre plante remarquable et protégée dans toute la Suisse : l’androsace helvétique (Androsace helvetica), une petite merveille qui se niche au creux des rochers. Elle forme un tout petit coussinet argenté et épanouit des toutes petites fleurs blanches légèrement rosées. C’est une plante impossible à installer. Elle vient toute seule et n’aime pas être forcée à s’installer quelque part.
Ce jardin est-il difficile à entretenir ?
Oui et non. L’essentiel du travail consiste à empêcher la propagation d’herbes indésirables. On arrose peu, seulement les nouvelles plantations. Je pense que la nature est bien faite et qu’il faut la laisser faire. Si des plantes disparaissent, on les remplace, mais pas forcément par les mêmes espèces. Les graines que nous recevons de tous les pays du monde germent plus bas en altitude. Quand elles mesurent quelques centimètres, nous les montons au jardin et les installons dans une couche. Il s’agit d’un endroit protégé en béton par-dessus lequel on pose un treillage pour que les animaux ne puissent pas entrer dedans. Puis les plantes quittent la couche pour trouver leur place dans le jardin.
Le jardin botanique de la Rambertia est accessible par le train à crémaillère “Montreux – Rochers de Naye” depuis la gare de Montreux (Canton de Vaud). En voiture, une route mène jusqu’aux Hauts-de-Caux. Puis, vous choisissez entre la crémaillère qui vous emmène jusqu’au terminus, ou la balade dans les prairies et les gentianes (prévoyez de bonnes chaussures de marche). L’entrée est libre et gratuite.