Bien décidée à s’installer comme herboriste-paysanne, Anaïs mène un combat herculéen pour donner forme à son rêve. Ses galères, ses colères, son dur boulot, ses amours… Dans ce documentaire engagé de Marion Gervais, on ne la quitte pas un instant, le cœur battant, pendant 1h44. Avec l’idée pour finir que si rien n’est simple, tout n’est pas complètement perdu non plus, dans notre monde de brutes !
Au cinéma, le 11 septembre 2024. Et la bande annonce en bas de l’article.
Chapitre 1 : s’installer, du rêve à la réalisation…
2013. Anaïs, 24 ans, tout juste diplômée en herboristerie, a décidé de créer son exploitation de plantes aromatiques bio, en Bretagne. Un projet qui va s’avérer plutôt difficile… Des profs misogynes, une administration compliquée (voire kafkaïenne), des gens qui doutent autour d’elle (heureusement d’autres l’aideront…), des conditions climatiques pas toujours clémentes… Rien pourtant n’arrêtera cette trublionne du monde rural, hyperactive et rebelle, qui paraît parfois bien seule au fond de sa caravane.
Anaïs croit en son rêve, à la vie qu’elle s’est choisie. Droite dans ses bottes d’agricultrice, elle va relever le défi à force d’obstination et de travail. On la suit ainsi au fil des jours et de ses confidences, tête baissée, mains dans la terre, frêle silhouette portant en elle toute l’énergie du monde. Avec sa chevelure blonde relevée en chignons foutraques, on pense à Cérès, déesse romaine des blés et des moissons. À la Pachamama, la déesse andine de la Terre. Mais c’est une guerrière que l’on a là ! Au pas vif, et qui ne mâche pas ses mots. Elle se battra jusqu’au bout.
De la passion des plantes à l’amour fou
Chapitre 2 : dix ans ont passé. On est en 2023. Notre va-t’en guerre s’en va maintenant quérir l’amour. Très beau, très loin… Seydou est originaire du Sénégal. La rencontre avec ce jeune homme à l’enfance difficile est un coup de foudre qui débouche rapidement sur un mariage en Casamance. Mais la dure loi des frontières est là. Tout le problème sera ensuite pour Anaïs de faire venir Seydou en France pour partager son petit paradis breton ou plutôt son « bidonville heureux » selon ses mots.
Le couple va s’y atteler avec énergie et obstination, tentant de déjouer les traquenards administratifs. Un job à plein temps qui transforme leur pièce de vie en standard et en bureau à paperasses. Gagneront-ils ce deuxième combat? On vous laisse le découvrir…
Marion Gervais : une réalisatrice engagée
On l’avait presque oubliée tant elle s’est mise en retrait, laissant les protagonistes occuper l’espace, sans trop imposer d’effets de style. Sensibilité, patience, délicatesse… Marion Gervais, documentariste depuis plus de 15 ans et récompensée par plusieurs prix, nous livre ici un diamant brut et nous berce avec lenteur, au rythme du quotidien : celui de la vie rurale, tout simplement.
Captée dès sa première rencontre par le charisme solaire d’Anaïs et nouant très vite une amitié avec elle, elle la filmera avec sobriété et constance pendant deux ans (pour le chapitre 1). Puis, de nouveau pendant quelques mois, dix ans plus tard (pour le chapitre 2). Un travail de longue haleine à propos duquel elle confie « Anaïs par sa manière très entière et très libre d’être au monde comme par son sens puissant de la combativité (…) répond en définitive, à une question qui sommeille en chacun de nous : c’est quoi vivre sa vie? Comment ne pas me soumettre aux injonctions de la société? Elle devient alors notre héroïne en incarnant ce que nous désirons le plus, être libre. Elle nous insuffle de la vie avec un grand V. En résumé, elle nous fait du bien ».
Alors, prenons notre part à cette cure de jouvence et d’optimisme et courons voir (ou revoir) le film ! Un moment fort et beau qui aidera peut-être certains à réaliser leur rêve…
“Anaïs, 2 chapitres”, Grand Prix Cinema for Change 2024. En salle, le 11 septembre 2024.
Réalisation : Marion Gervais. Production: Squawk, Juliette Guigon & Patrick Winocour. Distribution : La Vingt-Cinquième Heure Distribution.