Oiseaux, libellules, fourmis, méduses… Nicolas Eres nous transporte dans le monde poétique et solaire de ses sculptures inspirées par la nature. Nous l’avons rencontré dans sa galerie et son atelier à L’Isle-sur-la-Sorgue, dans le Vaucluse, où il nous a confié quelques secrets… Cet été, ses malicieuses fourmis rouges envahiront toute la ville !
Depuis quand fais-tu de la sculpture ?
Nicolas Eres : Mon plus vieux souvenir est qu’à onze ans, je découpais mes jouets et je prenais le pistolet à colle de mon père pour en faire des pièces très différentes. Ensuite, à dix-huit ans, je suis tombé malade. J’ai arrêté les études et j’ai commencé à travailler dans son atelier. Je réparais des machines agricoles avec lui. C’est là que j’ai appris à souder. Dès que j’ai découvert le métal, j’ai vu toutes les possibilités qu’il offrait et du coup je me suis vraiment consacré à ce matériau.
Tu empruntes de nombreux éléments à la nature. D’où vient cette inspiration ?
J’ai toujours grandi dans la nature. Depuis tout petit, je vis à la campagne, à L’Isle-sur-la-Sorgue. Et les étés, je les passais chez ma grand-mère en ex-Yougoslavie, en Serbie. Dans une ferme où il n’y avait rien d’autre que la basse-cour et les animaux.
Aujourd’hui encore, j’ai la chance de vivre entouré de nature. Je vais de l’atelier à la galerie à vélo tous les jours, à travers champs, c’est un moment très important. Et le matin quand je me lève, j’ai, tout près, des buissons remplis de petits oiseaux. Ça fait mon bonheur. Pour moi, la nature est aussi vitale que l’air qu’on respire. C’est ma première source d’inspiration.
Il y a deux ans, tu as couvert une partie de la façade de la Villa Datris avec tes fourmis. Puis tu en as dispersé 80 sur différents bâtiments de Namur, en Belgique. Comment est née l’idée ?
D’abord, je trouve la fourmi très graphique. Ce qui m’intéresse, c’est son exosquelette qui est vraiment très « design »! J’ai essayé plusieurs techniques pour le façonner, car je ne voulais pas faire un copié-collé de sa forme réelle. Du coup, je me suis mis à tordre le fer dans tous les sens, et j’ai essayé de jouer ainsi avec le plein et le vide.
La fourmi me permet aussi de faire des installations. Je peux la représenter en colonies. Ça illustre un peu l’idée de la nature qui reprend le dessus sur la construction humaine. Faire ces installations sur des bâtiments anciens ou contemporains me paraît vraiment approprié.
Quels autres éléments de la nature trouve-t-on dans ton œuvre ?
Je partage ma vie et mon travail avec Audrey qui est marseillaise. Du coup la Méditerranée et les méduses m’inspirent. J’aime bien les comparer à des danseuses, un ballet un peu gracieux… Pour les réaliser, je mélange le fer et le verre, avec l’aide d’un souffleur de verre, pour garder la transparence.
Sinon, j’aime beaucoup les plantes. J’aime les observer dans la nature, mais après, je laisse cette vision de côté, mon inconscient travailler, et je dessine vraiment sans modèle. J’essaie de créer quelque chose de graphique. Dans mon travail, le vide est aussi important que le plein. Une petite branche, par exemple, je vais l’entourer d’un cercle pour la mettre en valeur et délimiter le vide.
J’aime aussi beaucoup les libellules. J’en ai réalisé une, il y a quelques années, pour la mairie de L’Isle-sur-la-Sorgue qui l’a installée au-dessus de la rivière. J’aime les papillons dont je fais aussi des installations. On peut en choisir un pour mettre au mur. Mais on peut lui préférer l’envolée d’une centaine d’entre eux pour avoir quelque chose de vraiment éclatant.
Tu utilises la feuille d’or ?
Non. J’utilise de la feuille de cuivre dorée que je peux patiner. Une façon de donner de la profondeur à la matière. J’utilise rarement de la peinture.
Tes sculptures peuvent-elles être placées en extérieur ?
Oui, parfaitement. Les fourmis rouges sont thermolaquées et ne bougent pas avec le temps. De même, je vernis mes papillons. Ils vont se patiner progressivement. Plus ça se patine, plus je trouve ça beau. J’aime bien que la sculpture vieillisse avec nous. Peut-être que cela vient du fait que j’habite L’Isle-sur-la-Sorgue, le rendez-vous des brocanteurs et des antiquaires. J’aime bien les objets patinés qui ont une histoire.
En réalises-tu pour des jardins ?
J’aime bien l’idée de réveiller le jardin avec une sculpture qui amène quelque chose de coloré ou de décalé. Je peux réaliser en très grand mes Cercles de vie (ceux avec les papillons et les oiseaux). En général ils font 2,20m de diamètre. Les papillons, eux, peuvent atteindre 1,20 m d’envergure. J’expose régulièrement dans la Bastide rose, la fondation créée par Poppy et Pierre Salinger, l’ancien porte-parole de John F. Kennedy qui avait pris sa retraite ici. C’est un très beau lieu entouré d’un parc, au Thor.
Quelles sont tes techniques de fabrication ?
Je suis autodidacte, mais j’adore expérimenter les choses. Je ne me dis jamais que je rate quelque chose. Ce qui ne me sert pas sur le moment me servira plus tard. Parfois, un morceau de métal tombé par terre me donne une idée. Ou au contraire, il ne me dit rien du tout et ressort dans ma tête quelques années après.
J’ai été ferronnier pendant une dizaine d’années et cela fait aussi dix ans que j’ai la chance de pouvoir vivre de ma sculpture. Je pense que le fait de ne pas avoir fait d’études est une chance. L’apprentissage est beaucoup plus long, mais on n’est pas formaté. Parfois, je prends un outil et je le détourne de sa fonction initiale, ce qui me donne une texture particulière sur le métal. Je me sens complètement libre.
Tu fais aussi quelques œuvres sur papier…
Oui, je les obtiens avec une technique d’estampage typique des pays de l’Est. Les murs de la maison de ma grand-mère étaient enduits à la chaux et couverts de motifs réalisés avec des petits rouleaux en caoutchouc. J’en ai récupéré une trentaine de mon oncle qui était peintre. Ils sont très beaux, très graphiques et m’inspirent. J’aime bien, de temps en temps, imprimer avec quelques papiers pour les présenter en contraste avec mes sculptures. Ils me rappellent mes vacances d’été, quand j’étais enfant…
Les oeuvres de Nicolas Eres sont exposées en permanence à la Galerie de Palerne, 19 rue de la République, Impasse de Palerne, 84800 L’Isle-sur-la-Sorgue. On les trouve aussi à Saint-Rémy de Provence. Pour aller sur son site, cliquez ICI
La ville de L’Isle-sur-la-Sorgue exposera ses Fourmis dans ses rues et sur ses bâtiments de Juillet à septembre 2021.
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