À la suite du livre Poétique des jardins, qu’il avait publié en 2011, désormais épuisé, Jean-Pierre Le Dantec, cet amoureux des jardins, continue d’enrichir ses écrits sur cet art. Ce livre est construit selon un lexique de termes à partir desquels l’écrivain analyse l’histoire des jardins et leur évolution dans le temps et à travers le monde. Une citation ouvre chaque texte et les visions de paysagistes éclairent ses propos. L’auteur se rapproche d’abord de Vaugelas et le cite : Dans Ses remarques sur la langue française, celui-ci a écrit « le mot jardin est le plus beau de la langue française ».
Des mots
Le premier terme « Sauvage » est examiné à partir d’une traversée historique de la pensée des paysagistes allant de William Robinson à Gilles Clément. « Microcosme » est porteur de sens. De nombreux exemples de jardins peuvent s’y référer, nous dit l’auteur. En mettant en exergue la clôture, il précise que « créer un jardin, consiste à établir une partition dans l’espace » et rappelle que l’étymologie du mot jardin renvoie à l’enclos.
Le concept de « nature » l’amène à revenir sur des apports philosophiques, à comparer le paysage par rapport au jardin. D’où un essai sur le paysage. On peut retenir cette phrase :
« Tout jardin est un microcosme, une composition de paysages ».
Notons également que les jardins sont aussi des laboratoires, des lieux d’inventions techniques. Le parc de Versailles conçu par Le Nôtre en est un exemple. En examinant de quelle manière les jardins relèvent de questionnements relatifs à la santé, l’écrivain rappelle que diverses civilisations ont établi des listes de plantes médicinales.
Naissance des jardins botaniques
Parallèlement à l’invention de l’herbier par Luca Ghini au 16e siècle, les premiers jardins botaniques européens sont nés. Remarquons également, grâce à l’auteur, les vertus des plantes phyto-remédiatrices. Le jardin peut être également considéré comme une œuvre d’art vivante, explique l’auteur. L’eau y est essentielle. Elle est au cœur du premier jardin d’Eden, elle procure des plaisirs au jardinier, constitue une bénédiction et compose également un matériau esthétique au jardin, à la fois coulante, en cascade, dormante et jaillissante.
L’eau
L’eau contribue à la survie de la planète dans la période de dérèglement climatique que nous vivons. La lumière permet d’aborder l’art des jardins, notamment en écho avec la peinture de paysage, tel que certains penseurs l’ont théorisée. Les enjeux politiques traversent aussi le développement des jardins.
Le terme « communs » conduit ensuite l’auteur à évoquer le contexte de l’apparition des jardins ouvriers, puis des jardins communautaires ou partagés. Ces jardins, nous dit-il, pourraient devenir des « communs », c’est-à-dire des ressources collectives aussi fondamentales aujourd’hui que l’eau, l’air pur et le climat soutenable. Dès son origine, le jardin est lié à la ville. Continuons de suivre la pensée de Jean-Pïerre Le Dantec et découvrons l’histoire des jardins publics. L’expérience de la promenade est d’ailleurs liée particulièrement au jardin. La vue, les bruits, les odeurs et les matières sollicitent les sens du promeneur.
Enfin, l’auteur conclut ses essais en expliquant que l’art du jardin donnerait « à voir et à ressentir, dans une hétérotopie aménagée à l’aide de plantations vivantes et de matériaux inertes, la représentation d’une « belle nature » ou plutôt de la « nature idéale » qu’une civilisation humaine s’est construite à une époque déterminée de son histoire ».
Ainsi, cet ouvrage invite à relire l’histoire du jardin à travers la philosophie, la littérature des exemples concrets de jardins à travers le monde et les époques. Dans cette période marquée par les enjeux liés à la crise environnementale, l’auteur déploie de nouvelles perspectives quant au devenir de l’art du jardin.