Ouverte il y a deux ans dans le XIXe arrondissement, à Paris, L’eau et les rêves est à la fois une librairie botanique, un café et un lieu d’événements et de rencontres pour tout ce qui a trait au végétal. Des présentations de livres, des ateliers, une grande terrasse de 100 m2 avec chaises longues, où l’on peut (sauf en ce moment…) consulter librement un choix d’ouvrages… Activités et projets fourmillent. Nous avons interrogé Cyrille Bruneau, créateur des lieux.
Hortus Focus : quand as-tu ouvert cette librairie, comment est né le projet ?
Cyrille Bruneau : il y a un peu moins des deux ans, je cherchais un lieu à reprendre ou à créer pour en faire un café. Je voulais prendre mon temps, il n’y avait pas d’urgence parce que j’avais un boulot que j’aimais bien et qui marchait bien. J’imaginais un petit coin de rue avec de grandes baies vitrées et plein de plantes dedans.
Au bout de deux ans de recherche active, j’ai vu que cette péniche était en vente. Je la connaissais pour y être venu acheter des livres. J’ai sauté sur l’occasion, car c’est un lieu que j’aime beaucoup. J’ai rencontré le propriétaire. Pendant six mois, on a sympathisé, on a fait connaissance, et le projet a mûri. D’un café, c’est devenu un café-librairie. Je voulais garder cet aspect livres qui fait partie intégrante de la péniche depuis 40 ans.
La péniche a-t-elle beaucoup navigué avant de se consacrer aux livres ?
Elle date de 1950 et a d’abord servi au transport, notamment de céréales. Puis elle a été transformée en librairie en 1980. Elle était à Melun à l’époque, s’appelait Pollen, et était déjà spécialisée dans la nature. Elle a changé de mains plusieurs fois. Mon prédécesseur était marin. Il l’a retapée, avec sa femme, pendant cinq ans. Cela a été long et compliqué, y compris pour trouver un emplacement. Finalement ça n’a pas bien marché, et ils ont fini par vendre. Les choses ensuite se sont mises en place toutes seules. Avec mon associé, on a changé la thématique marine-voyage pour privilégier la nature, le jardinage, le jardin, les plantes. Et on a tout de suite ouvert le café.
La péniche et les livres font-ils bon ménage ? N’y a-t-il pas trop d’humidité ?
En fait, une péniche c’est très sec, c’est vraiment fait pour rester sec à l’intérieur. On combat l’humidité au maximum, sachant que sur le canal, on n’a pratiquement pas de courant. Si une péniche prend l’eau, c’est qu’il y a un problème ! À Paris, c’est un commerce flottant, comme un bâtiment entouré d’un jardin. Mon stand à la foire des plantes de Chantilly est beaucoup plus humide.
Quels liens entretiens-tu avec les plantes et la nature ?
Pour moi, la nature est une passion. Mais une passion d’amateur. J’ai toujours été fasciné par les arbres, les plantes vertes, les plantes toxiques… J’aime me dire que cette plante, là, par exemple, je pourrais l’arracher et la tuer, mais qu’elle pourrait aussi me tuer. Alors, quand je me suis trouvé avec cette librairie entre les mains, j’ai décidé de la consacrer à la botanique et au jardin. Chose qui n’existait plus à Paris.
Quel genre d’ouvrages vends-tu ?
On essaie d’être le plus large possible. On a des livres très pratiques sur le jardinage, la permaculture qui est assez dans l’air du temps, l’horticulture (potager, associations de plantes, soin des sols…). On a un rayon consacré aux graines : comment les produire, de beaux livres qui les montrent en photo. Un rayon sur le paysagisme, les bois, l’art végétal, les bouquets, l’art de dessiner les plantes. Un petit rayon sur Gilles Clément et ces courants de pensée qui veulent laisser la nature et les jardins pousser librement.
On s’intéresse aux arbres (sylvothérapie, arbres de jungle, arbres remarquables en France, dendrologie), aux champignons, à l’écologie, à la cuisine, à l’alimentation (surtout pour les veggan, sans gluten et végétarien), aux animaux. Enfin, nous proposons des livres sur les chamans (druides, remèdes de sorcière comme Hildegarde von Bingen), un rayon jeunesse et BD pour inciter les enfants à s’intéresser à la nature.
Tu organises aussi des événements…
Au-delà d’une librairie botanique, j’aspire à réunir ici tout ce qui tourne autour du végétal, à faire de cette péniche un lieu de rencontre. J’ai un salon à l’avant de 30 m2 que j’ai pensé le plus modulable possible. On peut le meubler de tables et de chaises pour des présentations de livres ou des colloques. Ou le vider complètement. Quand on a accueilli Gilles Clément ou le chaman Laurent Huguelit pour une soirée amazonienne, on a pu asseoir une trentaine de personnes.
À côté de cela, on a une grande table où on peut faire des ateliers pour enfants, des ateliers de peinture végétale, de jardinage et bientôt de fabrication de terrarium.
Je suis aussi en train de mettre en place un rendez-vous mensuel de vente de plantes avec des producteurs de différentes régions qui pourraient disposer de l’extérieur et de l’intérieur, comme une sorte de boutique éphémère. Cette mise à disposition ne serait pas payante, l’idée étant de faire venir du monde, de faire bénéficier à mes clients de prix inférieurs aux prix parisiens. Tout en offrant un profit au producteur.
D’autres projets dont tu voudrais parler ?
Tout, ici, est en développement. D’ici à la mi-juin, nous allons ouvrir un site de vente de livres en ligne. Plus tard, on veut végétaliser la terrasse, créer une serre… C’est un lieu qui va évoluer petit à petit. Il est devenu un projet de vie passionnant. Je ne compte pas mon temps et je suis heureux d’y venir tous les matins !
Péniche café/librairie botanique L’Eau et les Rêves, 9 quai de l’Oise, 75019 Paris. Tél.: 09 51 55 08 75 et 06 82 14 02 33. La librairie est ouverte et des chaises longues sont à disposition sur la terrasse pour lire librement en respectant les distances. A partir du 2 juin, réouverture du café (sur la terrasse). Pour tous les renseignements, cliquez ICI