De la feuille morte au papier…

Valentyn Frechka inventeur du papier à base de feuilles
©releaf

Valentyn Frechka a 23 ans. Il est ukrainien et concourt pour le Young Inventors Prize, un prix européen de l’invention, pour sa production de papier à base de feuilles mortes. Et il semble avoir le vent en poupe !

HF : Valentyn, où avez-vous grandi ? Quel a été le rôle de la nature dans votre enfance ?

Je suis né et j’ai grandi en Ukraine occidentale, au milieu des montagnes des Carpates. J’étais en pleine nature. Les arbres étaient toute mon inspiration. Enfant, j’allais cueillir des champignons en forêt au cours de grandes balades avec mes parents. Adolescent, je faisais du vélo et de la randonnée dans les bois. Voilà ce qui a façonné les valeurs qui m’animent aujourd’hui et qui guident mon désir de vivre en harmonie avec la nature.

HF : Comment a émergé l’idée du papier à partir des feuilles mortes ?

Étudiant, je préparais un projet de recherche scientifique avec mon professeur de chimie sur les polymères végétaux. Il s’agissait de produire du papier à partir de paille et d’herbe. Une idée m’a traversé la tête : et si les feuilles pouvaient, constituées des mêmes tissus que le bois, pouvaient se transformer en papier ? Finalement, je me suis décidé à ramasser des feuilles de chêne près de l’école. Je les ai traitées avec les méthodes que je connaissais et j’ai obtenu une masse fibreuse que j’ai soigneusement broyée pour la transformer en papier. J’ai obtenu les premiers échantillons, imparfaits naturellement. J’ai donc perfectionné la méthode pour obtenir des fibres à partir des feuilles.

graphiques ©Releaf
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HF : Comment passe-t-on de l’idée à la transformation en projet, puis en produit ?

Le chemin a été long et s’est étalé sur plusieurs années. Après avoir terminé l’école, j’ai cherché des moyens de valider l’idée à un niveau industriel. J’ai eu la chance que plusieurs usines de papier en Ukraine s’intéressent à ma technologie et acceptent de la tester sur leurs installations. Après de nombreux essais et la production de 50 tonnes de papier, nous avons atteint un niveau idéal. Ça confirmait ce que je pensais : la possibilité d’une production à grande échelle.

Alors, j’ai décidé de rechercher des investissements et pour cela j’ai créé l’entreprise RELEAF avec mon partenaire commercial Alexander Sobolenko. Nous avons monté une équipe, lancé les premières ventes pilotes, externalisé la production et obtenu nos premiers investissements. En cinq ans, nous avons fait connaître RELEAF dans le monde entier et ouvert des opportunités dans différents pays. L’intérêt pour les fibres alternatives a soutenu le projet. Nous étions au bon endroit, au bon moment avec le bon projet !

HF : Qui vous a aidé ?

Plusieurs entreprises ont été impliquées à différents stades du projet. Au départ, l’idée a été validée à l’usine de carton de Zhytomyr, près de Kiev, et le processus de fabrication du papier a été amélioré avec l’aide d’une entreprise d’Oleshky, dans l’oblast de Kherson, actuellement sous occupation russe.

Puis, des fondations telles que le WWF et Google for Startups ont fourni les premiers capitaux pour le développement. Pour le développement complet de la production pilote, le projet a été soutenu par l’EIC (Conseil européen de l’innovation) à hauteur de 2,5 millions d’euros et par divers outils d’accélération et de développement commercial.

La contribution significative de ceux qui travaillent encore aujourd’hui chez RELEAF et de notre communauté mondiale élargie a également été cruciale pour la promotion de nos produits et l’établissement de connexions avec les acteurs de l’industrie mondiale.

Valentyn Frechka inventeur du papier à base de feuilles
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HF : Quel est le potentiel de production de papier ?

Jusqu’en 2022, nous avons fonctionné uniquement sur la base d’un modèle d’externalisation. Ce modèle est actuellement en place et nous avons une capacité de production de papier de 10 000 tonnes par an. Ce papier sert de base à la production de Releaf Paper, ainsi qu’à la production de Releaf Bags for shopping et de boîtes en papier. Nous vendons déjà ces produits dans toute l’Europe.

Depuis 2023, nous avons commencé à construire notre propre centre de production pilote près de Paris, où nous pouvons améliorer notre technologie et produire de la pâte à papier pour entrer progressivement sur le marché. Une fois cette étape franchie avec succès, nous serons en mesure d’étendre nos activités à d’autres pays, notamment aux régions tropicales où l’ananas, la banane et le palmier à huile sont largement cultivés, ce qui nous permettra de traiter jusqu’à 1 million de tonnes de déchets verts par an.

HF : Avez-vous évalué votre production de papier sur le plan environnemental ? 

Oui, nous avons une analyse du cycle de vie (LCA) développée et approuvée par SGS et Climate Partner, qui montre notre faible émission de CO2 pour la cellulose et le papier.

RELEAF utilise des feuilles de plantes abondantes et disponibles publiquement comme matière première, réduisant ainsi les déchets et la pollution. De plus, les produits RELEAF se décomposent en seulement 30 jours contre 270 jours pour le papier conventionnel, minimisant davantage l’impact environnemental. Notre papier est également recyclable.

En ce qui concerne la biodiversité, notre projet vise à valoriser les déchets verts urbains en les transformant en matière première pour la production de papier. Les feuilles proviennent des écosystèmes urbains, nécessitant une intervention humaine pour leur collecte et leur traitement. Nous proposons de prolonger leur cycle de vie en les transformant en papier, un biomatériau compostable après plusieurs cycles de recyclage.

HF : Dans combien de temps aurons-nous le plaisir d’utiliser vos sacs ?

Si nous parlons des sacs fabriqués à partir des feuilles de Paris, ce sera dès cette année.

Plus généralement, vous pouvez déjà acheter nos sacs, boîtes et carnets via notre site web.

Valentyn Frechka inventeur du papier à base de feuilles
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HF : Que vous manquerait-il pour vous lancer à plus grande échelle ?

Nous devons actuellement terminer le perfectionnement de notre technologie et de notre ligne pilote pour le traitement des feuilles. Une fois cela fait, nous pourrons nous développer à grande échelle.

Valentyn Frechka inventeur du papier à base de feuilles
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