Créer son poulailler, c’est partager sa vie avec des compagnes bien plus intéressantes et malignes qu’on le laisse penser. Les poules sont rigolotes, sympas, pondent des œufs délicieux et recyclent les déchets alimentaires. Donnez-leur un peu d’attention et elles vous la rendront au centuple ! Pour en parler, nous avons interrogé Hervé Husson, spécialiste et passionné !
HF : de quoi les poules ont-elles besoin ?
HH : Pour installer des poules dans un poulailler, assurez-vous qu’il y ait de l’herbe. Elles passent la moitié de leur journée à en manger. Si elles n’en ont pas assez, il est impératif de leur donner des compléments alimentaires.
Ensuite, les poules ont besoin d’espace non seulement pour se dégourdir les pattes, mais aussi pour s’assurer une alimentation équilibrée. L’idéal est un mix prairie et sous-bois. Un écotone à la biodiversité particulièrement riche. On recommande 20m2 par animal. Les miennes se partagent 2500 m2, composés de plusieurs écosystèmes et donc d’une nourriture riche qui assure leur bonne santé.
HF : Définissez un « bon » poulailler ?
HH : Un bon poulailler est tout d’abord confortable pour les gallinacés, durable dans le temps, facile à nettoyer et à réparer.
Ma recommandation est de le construire soi-même, car c’est généralement moins cher que de l’acheter dans le commerce et plus pratique à utiliser. On peut choisir le bois (FSC, gestion durable), passé par l’autoclave pour résister au temps, et très épais pour être solide. Pour qu’il soit facile à nettoyer, je conseille de faire en sorte de pouvoir entrer dedans. Ça permet également de pouvoir surveiller la santé des poules de façon sérieuse et régulière.
HF : Pourquoi faut-il surveiller le poulailler ?
Les poules sont agressées par un parasite, le pou rouge, qui les affaiblit et peut même aller jusqu’à les tuer. Sa reproduction est phénoménale, il faut donc le repérer au plus tôt pour s’en débarrasser.
Ce parasite ne vit pas sur la poule, mais dans les interstices du poulailler, derrière un meuble ou sous un plancher. La nuit, lorsque les poules dorment, ces poux rouges viennent les piquer et leur sucer le sang jusqu’à l’anémie. Un bon poulailler est construit de façon à les empêcher d’accéder au perchoir et au pondoir.
HF : comment doit-on construire son poulailler ?
HH : Moi, je me suis contenté, d’acheter une petite cabane de jardin, un simple cube. J’ai posé mes perchoirs et mes pondoirs sur des caisses qui n’entrent pas en contact avec les parois du poulailler. Au sol et entre chaque pondoir, j’ai installé une litière de sable. Les poux rouges ne peuvent pas se déplacer sur cette matière à cause de la silice qui déchire leur peau. Chaque pondoir est indépendant du voisin et ne touche pas les murs. Au sol, je remets une couche de journaux que je couvre de sable et que je change quotidiennement.
HF : combien de sable est-ce que ça représente sur l’année ?
HH : J’utilise 150 kg de sable sur un à deux ans. Souvent, vous trouverez des recommandations pour de la terre de diatomée. Moi, je préfère le sable qui est moins agressif pour les voies respiratoires des poules. Une astuce : placez un morceau de scotch double face sur les poteaux qui mènent aux perchoirs ou aux pondoirs, ça bloque les poux !
HF : Quelle clôture doit-on installer autour du poulailler ?
HH : Il faut construire ce que j’appelle une zone de sécurité. Mes poules disposent d’une zone de sécurité de 4 m2 autour du poulailler, entourés d’un grillage de 2 m de haut. Une bande de grillage au sol à l’extérieur et des rondins à l’intérieur pour que ni le renard, ni les poules ne puissent creuser le long, complètent le dispositif. C’est étonnant de voir à quel point les poules aiment creuser le long de leur grillage !
Un bain de poussière leur est indispensable pour lutter contre les parasites et s’il n’y a pas de terre dans l’enclos, il faut le prévoir. Ce bain doit être protégé des intempéries, car les poules ont besoin de terre sèche.
HF : Parlons alimentation, comment bien nourrir les poules ?
HH : Les poules mangent du grain. Vous trouvez des mélanges comme maïs-blé-sorgho, et les recettes varient au fil des saisons, avec plus ou moins de féverole ou de pois. Contrôlez que le mélange leur convienne et qu’elles mangent tous les types de graines. Il m’est arrivé de trouver des super mélanges de graines bio et de m’apercevoir qu’elles laissaient certaines graines qu’elles n’aimaient pas.
Et puis, elles dégustent presque tous vos restes alimentaires. Elles adorent les choux et les betteraves.
HF : Que doit-on éviter ?
HH : Les poireaux, les tomates et les produits laitiers. Leur estomac ne peut pas les digérer. La viande, à toute petite dose et crue. Pensez qu’elles mangent déjà des vers de terre et autres insectes ou batraciens, elles ont donc leur comptant de protéines animales. Ce qui est absolument interdit, c’est la pomme de terre crue et ses pelures qui contiennent des alcaloïdes.
Et, si vous voulez des œufs bio, mangez bio et donnez-leur du grain bio. Pensez à leur donner de l’eau, propre de préférence. Moi, je change leur gamelle d’eau tous les jours.
HF : Est-il exact que les poules aiment les herbes aromatiques ?
HH : En fait, elles y ont recours pour se soigner. Comme tous les animaux, elles sont capables d’un certain niveau d’automédication. Moi, je suis en Bretagne. Mon principal souci c’est l’humidité qui entraîne des problèmes respiratoires. J’ai planté beaucoup de thym dans leur enclos. Elles vont taper dedans quand elles sont enrhumées. Et j’ajoute des tisanes de thym dans leur eau en supplément. Donc oui, leur mettre à disposition des plantes aromatiques et médicinales, c’est une bonne idée.
HF : Comment sait-on que les poules ont des problèmes de santé ?
HH : C’est un peu comme avec tous les êtres vivants que l’on côtoie régulièrement, il faut les observer. Et quand quelque chose cloche, on s’en aperçoit : une poule qui reste dans son coin, qui ne fait plus sa toilette, qui ne mange pas, c’est mauvais signe. Ce n’est guère différent de votre chat ou de votre chien.
HF : Se pose alors le problème du choix des poules !
HH : Vous voulez des œufs ? Prenez des poules rustiques, comme les poules rousses. Achetez-les au printemps, chez un éleveur qui vous permet de visiter son élevage ou au marché si vous le connaissez. Choisissez des races locales ! Et rappelez-vous que les poules d’ornement (nègre-soie, padoue) sont beaucoup plus fragiles.
Méfiez-vous des sites internet à bas coût !
Prenez le temps d’inspecter la poule que vous souhaitez acquérir. Regardez son derrière, si des fientes y sont collées, elle est potentiellement malade ou atteinte de vers. Le bec doit être dur et complet. L’animal doit être dodu sans espace déplumé. Les pattes ne doivent pas être écaillées, ce serait signe de gale.
HF : J’ai envie de partir une semaine, puis-je laisser les poules seules plusieurs jours ?
HH : Oui, si vous investissez dans un bon distributeur de grain et d’eau. Nettoyez le poulailler à fond avant pour vous assurer que le pou rouge n’y est pas installé. Ce sont des animaux autonomes sur la semaine. Si vous avez des rapports de bon voisinage et que vous pouvez demander à ce que l’eau soit changée tous les jours ou tous les deux jours, c’est encore mieux. Pendant cette semaine, laissez-les dans la zone de sécurité. Elles seront un peu serrées, mais ce sera moins risqué.
HF : Une dernière question : que dois-je faire des fientes ?
HH : Laissez-les composter pendant un an et utilisez-les comme engrais, c’est excellent pour le potager !
Hervé Husson est notamment l’auteur de « Guide des races de poules » et de « Poules, le guide complet de l’éleveur amateur », parus aux éditions Ulmer.