Plantez des arbres, des arbres, des arbres !

Les arbres au Mas des Béalières
Au Mas des Béalières ©Isabelle Vauconsant

Nous en avons tant coupé ! Les arbres sont aujourd’hui plus que jamais considérés comme nos meilleurs alliés face aux températures qui montent et au nombre des petites bêtes qui descend. Les arbres sont une des multiples solutions pour tenter de conserver une planète habitable, car ils accueillent une biodiversité tant dans le sous-sol qu’en aérien. Ils constituent des îlots de fraîcheur formidables et séquestrent le CO2 devenu un de nos pires ennemis. Ils structurent les sols, coupent le vent et pour notre plus grand bonheur, ils sont beaux !

Mais, nous parlons là de variétés multiples. Point n’est question ici de planter en ligne et bien droit sur fond de rigidité mentale. Nous allons découvrir le très joli travail de Fabrizzio Mazzobel, éleveur d’arbres à Rognes. Il propose une centaine d’espèces et de variétés de jeunes plants, d’un an ou deux. Des bébés !

Fabrizzio Mazzobel - plants forestiers
Fabrizzio Mazzobel ©Isabelle Morand

Au départ, ces variétés sont plutôt adaptées au climat méditerranéen. Mais bien sûr, comme on ne peut plus l’ignorer, ce climat tend à remonter vers le nord. On peut donc planter un certain nombre de ces arbres jusque dans le nord de la France où ils s’adaptent bien.

Et comme il est nécessaire de favoriser la biodiversité, Fabrizzio multiplie des espèces sauvages, comestibles, médicinales et mellifères… « pour remettre un peu de vie dans les endroits où l’on y prête peu attention. »

Forestier de formation, en Corrèze et dans les Vosges, il a traversé l’Atlantique vers la Guyane, puis est revenu en métropole dans le Sud.

Indépendant depuis près de 15 ans, il constate que les jeunes plants séduisent de plus en plus, même si l’entretien de jardin et les chantiers de plantation sont encore nécessaires à l’équilibre de sa petite société.

FM : Les consciences s’éveillent. Je crois que de toute façon, on n’a pas le choix. Et plus on plante d’arbres, plus la vie revient : les oiseaux, les abeilles, tous les insectes et beaucoup d’autres animaux. Donc, il faut planter des arbres !

Plantez des arbres : plants forestiers
plants forestiers ©Isabelle Morand

HF : Les agriculteurs sont souvent méfiants face à l’idée de planter des arbres sur leurs parcelles cultivées.

FM : Il faut réfléchir au fait que certes, on a une petite perte de surface, mais en termes de rendement, la décomposition des feuilles, la richesse et la tenue des sols et la fraîcheur des feuillages sont d’énormes avantages. Je suis convaincu, même si je ne suis pas chercheur qu’à terme, c’est positif. Moins d’engrais, moins de phyto, c’est moins d’argent et de meilleurs produits. Enfin, ramener de la vie permet une meilleure résistance des cultures tant aux ravageurs qu’aux maladies. Et c’est vrai au jardin aussi.

plants forestiers ©Isabelle Morand
plants forestiers ©Isabelle Morand

HF : Si on veut planter une haie, par quoi doit-on commencer ?

FM : Par le sol. 

Il faut aussi choisir des variétés bien adaptées à la qualité de la terre, au climat moyen, mais aussi essayer de se projeter.

Et puis il y a quelques questions à se poser : de quelle hauteur souhaite-t-on cette haie ? La veut-on comestible ? Fleurie ? Odorante ?

Ce qui est important pour cette biodiversité dont nous parlons, c’est de varier les espèces en couleur comme en hauteur. Dans le sol comme en aérien, le système forestier se construit par étage.

De jeunes plans arbustifs constitueront la haie avec tous les 7 à 8 mètres un grand arbre. Quelques fruitiers seront les bienvenus pour nous, mais aussi pour les oiseaux. Par ailleurs des arbres différents offrent des habitats adaptés à différents oiseaux, mais aussi aux petits mammifères.

Plus on mélange, plus c’est résistant et plus c’est agréable à l’oeil. Et on met un petit peu de vie avec plein d’espèces ; peut-être des feuillages persistants à mêler avec des feuillages caducs, des fruits, des arbres pour le bois ou brise-vent pour le paysage.

HF : Pour le vent, y a-t-il des recommandations à faire ?

FM : On peut en concevoir de plusieurs hauteurs. On a de grands classiques utilisés dans la vallée du Rhône comme les cyprès, les peupliers. Mais si vous plantez une haie très mélangée avec des prunelliers, des aubépines, des chênes, des tilleuls, des micocouliers ou des acacias, ce sera parfait contre le vent.

L’idéal et de faire plusieurs rangées ou en quinconce pour améliorer la résistance au vent.

HF : Vous proposez des godets forestiers, quelle est leur particularité ?

FM : C’est un godet antichignon ; les racines ont à peu près une quinzaine de centimètres. Et c’est le prix aussi qui est intéressant. L’avantage du godet par rapport aux racines nues, c’est qu’on peut planter à peu près toute l’année si on a un arrosage à l’issue de la plantation.

À la différence de la racine nue qu’on plante de préférence à l’automne et sur une période courte. Le godet forestier permet aux plants de s’enraciner, notamment dans des conditions un peu difficiles et de trouver l’humidité en profondeur. Or en ce moment, c’est crucial.

Plantez des arbres : plants forestiers
Foire aux Plantes rares de Saint-Priest : plants forestiers ©Isabelle Morand

HF : Quels arbres se plantent dans quels terrains ?

FM : Ce qui compte c’est la composition du sol : acide ou calcaire. Et les espèces sont adaptées à l’un ou à l’autre.

Toutefois parmi les espèces les plus résistantes on trouve le pin et l’acacia qui se plaisent dans le sable. Mais dès qu’on a constitué un vrai sol forestier, on peut pratiquement tout mettre. Les arbres se soutiennent entre eux.

HF : Vous être un ancien forestier et ceux qu’on croise en ce moment manifestent une forte inquiétude face au stress hydrique et climatique que vivent les forêts.

FM : Oui, c’est vrai. Aujourd’hui, c’est une des raisons pour lesquelles les espèces méditerranéennes remontent vers le nord. Elles sont mieux habituées aux périodes de sécheresse. Et dans le Sud, des organismes comme le Cemagref, l’INRAE et le CRPF font des recherches et essayent des plantations originaires du sud de l’Espagne, du Portugal ou même des pays du Maghreb.

Sol calcaire

Le sol calcaire présente un aspect blanchâtre et crayeux. Il se dessèche vite. des sols français sont calcaires. Ils ne nécessitent pas de précautions particulières, sont perméables et souvent bien drainants.

Sol sableux

Appelé aussi sol siliceux, le sol sableux est rêche au toucher et se désagrège facilement dans la main. Il a tendance à retenir l’eau et manque de stabilité en cas de fortes intempéries.

Sol argileux

Le sol argileux est de couleur grisâtre et très compact. Il forme facilement une boule de terre et se gonfle d’eau. En cas de sécheresse, il change de texture. L’argile se compresse et se rétracte. Il tend à asphyxier le système racinaire des plantes.

Des cartes départementales permettent de situer les différentes zones.

HF : Et dans les sols argileux ?

FM : Dans un sol très compact comme ça, le mieux est d’apporter de la matière organique afin d’en améliorer la structure. Le risque, c’est l’asphyxie, mais on peut y mettre des fruitiers, du chêne, du tilleul ou des érables.

L’avantage lorsqu’on mêle les espèces, c’est que si certaines peinent un peu, ce ne sera pas le cas de toutes. Et comme on est en godet, avec des prix entre 5 et 8 euros, ce n’est pas ruineux, donc ça permet des expériences.

HF : Souvent, dans les jardins, les arbres sont plantés trop serrés ou trop près de la maison. Quels conseils donneriez-vous ?

FM : Pour une haie épaisse, on placera des arbustes tous les mètres, à peu près.

Les arbres doivent être espacés de 7 à 8 mètres. Comme ça, on aura une haie vraiment compacte,  brise-vent avec un étage dominant et un étage en dessous.

Pour la maison, c’est 8 à 10 mètres !

HF : C’est très long pour un jeune plant de commencer à être un arbre ?

FM : L’avantage des jeunes plants, c’est qu’en général il n’y a pas de crise de transplantation. Ils continuent à pousser à la même vitesse.

Pour des plants de deux ans qui ont une croissance un peu importante et mesurent déjà 50 à 60 cm, on compte 25/30 cm de pousse chaque année. Ça dépend de la richesse du sol, bien sûr. Mais en général, au bout de trois ou quatre ans, on a déjà une équipe constituée qui dépasse la hauteur d’homme.

HF : À partir de quand sont-ils vraiment utiles aux pollinisateurs ?

FM : Ça dépend un peu des arbres. Ici, à Saint-Priest, mes prunelliers ont deux ans et sont déjà en fleurs donc ils attirent déjà les abeilles. Ils sont même capables de produire des petits fruits.

Mésange sur aubépine
©Creativenature
Des arbres et des Hommes
  • Comment dialoguer avec les arbres dans les jardins ?
  • Pourquoi raconter des histoires naturelles ?
  • En quoi la forêt est l’avenir de l’homme ?
  • Comment restaurer un patrimoine vivant ?

Éditions Garden-Lab
Sylvie Ligny – Cécile Christophe
178 p. – 22 €

 

De la biodiversité au service de nos papilles

Changer de rapport à la nature, aux plantes, s’imprégner de leurs histoires dans un livre qui se lit comme un roman.

François Couplan est ethnobotaniste.
Éditions Les Liens qui Libèrent
370 p. – 22,80 €

Guide pour faire échouer des projets contre nature

Protéger le Vivant, éviter des projets inutiles qui mettent à mal la biodiversité, font tomber des arbres et détruisent des écosystèmes.
François Verdet, activiste, propose un guide de résistance contemporaine pour mener des luttes efficaces au profit de la nature.

Éditions La Relève et la Peste
168 p. – 20 €

Inscrivez-vous
pour recevoir [Brin d'info]

dans votre boîte de réception,
chaque semaine.

Nous n’envoyons pas de messages indésirables ! Lisez notre politique de confidentialité pour plus d’informations.

417 Shares 2.9K views
Share via
Copy link