Les Jardins en mouvement d’Arc-et-Senans

Didier Hirsch

IIls sont pérennes, mais en mouvement ! De nouveaux jardins en mouvement ont été aménagés à la Saline royale d’Arc-et-Senans, avec les conseils du paysagiste Gilles Clément. Ils ont été installés sur les parcelles jusqu’alors réservées au Festival des Jardins, dans le premier demi-cercle historique de la Saline (voir notre article consacré à l’histoire de ce lieu unique au monde). 

On vous emmène faire un tour dans ces jardins en mouvement avec Denis Duquet, responsable des jardins. Le paysagiste Gilles Clément est intervenu en collaboration avec le bureau d’études chargé de la rénovation des jardins. Il est venu plusieurs fois à la Saline royale et, avec l’équipe des jardiniers, nous avons fait le tour des jardins. Il a expliqué à tous ce qu’est le jardin en mouvement et le jardinage par soustraction : observer, décider de ce que l’on ne va pas garder dans le jardin. Les végétaux, la biodiversité retrouvent ainsi toute leur importance.

Denis Duquet, Arc-et-Senans
©Didier Hirsch

Les jardins en mouvement

Le jardin du temps

Au centre, un bassin aux bords ornés de schiste. Sur les côtés, des structures (treillis métalliques) sur lesquelles commencent à crapahuter des plantes grimpantes, notamment un grand nombre de clématites. À terme, la végétation formera un tunnel. Autour, en hauteur, a été installé un cyanomètre.

Jardin du temps Arc-et-Senans
©Didier Hirsch

Cette invention de 1789 a été utilisée par ses créateurs (Horace-Bénédict de Saussure et l’explorateur Alexander von Humboldt) pour mesurer l’intensité du bleu du ciel. Les panneaux déclinent donc toutes les teintes de bleu, et l’on s’amuse à trouver la couleur du ciel du moment.

Gainothèque - Arc-et-Senans
©Didier Hirsch

La Grainothèque

C’est un jardin organisé en « casiers ». Dans chacun ont été semées des graines. L’objectif, c’est l’observation de la manière dont vont – ou pas – se disséminer les graines en fonction du vent, des conditions d’exposition, des passages des visiteurs ou des animaux. On y trouve des nigelles de Damas (Nigella damascena), des molènes (Verbascum), des pavots… qui ne se ressèment pas de la même façon. «C’est là que le jardinage doit être très fin.

Le jardin doit rester lisible et esthétique, et ne pas se transformer en un territoire conquis par une seule plante. Dans cette parcelle, du tussilage (Tussilago farfara) est venu s’installer tout seul et on l’a laissé vivre sa vie. Cette plante a tendance à conquérir les gravats, les terrains vagues et nous on trouve que c’est un chouette couvre-sol.» Dans ce jardin pousse aussi un Buddleia, réputé pour sa capacité à tout conquérir, mais qui ici, se tient bien : « Le sol est couvert, il n’a pas beaucoup de place pour se reproduire. On le surveille, mais pour le moment, tout se passe bien.»

La Dormance

C’est un jardin organisé autour de catalpas, noyers, hamacs qui étaient déjà présents. Il est destiné à mettre en valeur cette faculté assez incroyable qu’ont les graines à conserver leur qualité germinative et à attendre que les conditions soient favorables à leur levée. « Certaines plantes attendent, par exemple, un incendie pour germer, par exemple. Dans ce jardin, nous avons planté un cytise, un savonnier (Koelreuteria paniculata) et des érables pour le graphisme de leurs graines. »

cercle des cryptogames, Arc-et-Senans
©Didier Hirsch

Le Cercle des cryptogames

Cryptogame qualifie un végétal dont les organes de fructification sont peu apparents, voire cachés au contraire des angiospermes. L’histoire de ce jardin est intéressante : « Il a été installé sur un jardin qui existait déjà, et nous l’avons confié à de jeunes paysagistes qui voulaient faire un jardin de mousses. Mais la mousse n’est pas obéissante, elle vient là où on ne le souhaite pas et elle refuse de s’installer là où on le voudrait. Nous leur avons alors proposé d’utiliser de vieux troncs de tilleuls coupés de l’année précédente et qui étaient couverts de mousse.»

Des jeunes du Lycée de Montmorot sont venus pour travailler sur un appareillage de ces troncs qui a permis de recréer un paysage de mousse. Le jardin est clos par une ceinture de peupliers, les mousses sont accompagnées par des fougères, des hostas. Une brumisation maintient constante l’humidité de l’air.

 

 

Les pieds sur terre

L’idée de ce jardin, c’est de se reconnecter avec le sol. « Nous avons utilisé divers matériaux de récupération pour créer des cheminements. Au tout début de l’ouverture de ce jardin, j’ai eu l’impression d’être à l’entrée d’une piscine ! Tous les gamins avaient jeté leurs chaussures à droite à gauche et ils en faisaient trois à quatre fois le tour ! »

Les pieds sur terre, Arc-et-Senans
©Didier Hirsch
Potapoule, Arc-et-Senans
©Didier Hirsch

Le Potapoule

Le jour où nous avons visité ces jardins en mouvement, nous avons cherché les pensionnaires à plumes du potager, mais elles étaient parties faire la sieste. En revanche, nous avons pu profiter du très beau potager nouvellement créé.

« Nous avons eu la chance d’accueillir une jeune femme, Fanny, qui s’était déjà occupée de potager quand elle travaillait au Musée de Maisons Comtoises. Elle a pris en main tout le potager, a mis en place la culture en butte, les techniques de la permaculture. Le potager est très abouti et il sert de support pédagogique pour différentes écoles. Les carrés ont été faits avec des écoliers par exemple.»

Le jardin comestible

C’est un jardin dense pour montrer que les végétaux ont la faculté de se protéger les uns les autres face à une canicule par exemple. C’est aussi une façon de montrer qu’on peut oublier le passé qui mettait d’un côté les fruitiers, de l’autre – et souvent à l’écart – le potager. Là, dans ce jardin, tout se mélange un peu à la façon des jardins créoles.

Kare-sensui, Arc-et-Senans
©DIdier Hirsch

Kare-sensui

Traduction : jardin sec. C’est un espace de méditation imaginé et réalisé par le célèbre Erik Borja.

Jardin du Vent à Arc-et-Senans
©Didier Hirsch

Le jardin du vent

Il fait partie des parcelles qui étaient quasiment vierges. « Nous avons choisi d’y planter une belle collection de graminées. On circule au milieu des Miscanthus, des Eragrostis avec quelques fleurettes venues s’installer ici et là. Ça bouge, ça ondule, c’est très poétique. »

L’Épine protectrice

C’est le regard de Gilles Clément sur l’ortie qui a donné à l’équipe des jardiniers l’idée d’apporter un autre regard sur les plantes qui piquent. Donc, on y trouve des plantes épineuses (mahonias, berbéris, ronces…) dont les pieds « nagent » dans une marée de stipas. Le cheminement métallique commence à disparaître et on a l’impression d’être aujourd’hui sur une plaque qui flotte.

L'épine protectrice, Arc-et-Senans
©Didier Hirsch

Dédale

Surprenant dédale qui, pour l’instant, est une œuvre artistique dans laquelle jouent les enfants. « Petit à petit, elle sera noyée dans la végétation…»

Des hémérocalles et des géraniums pour faire le lien

Entre le Jardin de la dormance et Les pieds sur terre, de généreux parterres font la part belle aux floraisons orange d’hémérocalles. « Nous avons eu l’opportunité de travailler avec un pépiniériste spécialisé dans ces plantes. Et nous ne le regrettons pas. C’est vraiment une plante extraordinaire, qui ne nécessite aucun arrosage. » À côté, entre ici et là, ont été plantés des géraniums ‘Rozanne’ qui assurent parfaitement la couverture du sol et évitent le désherbage. Ce duo est à l’image de ce que devront être les jardins de demain : généreux, mais archi-sobres.

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